mercredi 26 juin 2013

Avant Kant, nous étions DANS le temps. Maintenant, c'est le temps qui est en nous


Bon, alors évidemment, ça n'est pas la scène visuellement la plus impressionnante du film "Chronicle" (à base d'ados, qui font un peu n'importe quoi de supers pouvoirs nouvellement acquis).

Le film est plaisant, et pour ne rien gâcher, on y parle de Schopenhauer (et Platon). Schopenhauer est un philosophe allemand du XIXème siècle, que je m'en vais aborder dans les semaines à venir sur Arise Therefore. Son ouvrage principal "Le Monde comme Volonté et Représentation" prendra le relai dans ces colonnes de la lecture distrayante / dépaysante et haletante qu'était Salammbô.

Etant donné que ma dernière lecture philosophique était l'oeuvre de Kant, je me suis livré à une petite révision en attaquant par la friandise que constitue la "Critique de la Philosophie Kantienne". Bénéficier d'une master class de Schopenhauer, c'est quand même précieux. D'autant que former une analyse critique d'une philosophie n'est pas intellectuellement donné à tout le monde.

Avant de décortiquer et mettre en lumière les erreurs de celui qu'il considère comme un esprit supérieur (*), Schopenhauer prend le temps d'exposer "la pensée fondamentale qui constitue le dessein de toute la Critique de la raison pure", à savoir la distinction du phénomène et de la chose en soi (puisqu'entre les choses et nous, se trouve toujours l'intellect).

Kant montra que les lois qui, avec une nécessité infrangible, règnent dans l'existence, c'est-à-dire dans l'expérience en général, ne doivent pas être appliquées pour déduire et expliquer l'EXISTENCE ELLE-MÊME, et que leur validité n'est donc que relative, c'est-à-dire qu'elle ne commence qu'après que l'existence (le monde de l'expérience en général) a déjà été posée et qu'elle est déjà présente ; que, par conséquent, ces lois ne peuvent nous servir de fil conducteur quand nous en venons à l'explication du monde et de nous mêmes. Toutes les philosophies occidentales antérieures avaient cru, à tort, que ces lois, qui lient entre eux les phénomènes et qui toutes (temps, espace aussi bien que causalité et syllogisme) ont été groupées par moi sous l'expression de «principe de raison», étaient des lois absolues que rien ne conditionnait, des aeternae veritates [vérités éternelles]. Ils ont cru que le monde lui-même n'existait qu’en conséquence de ces lois et en conformité avec elles et que toute l'énigme du monde devait donc pouvoir être résolue en suivant leur fil conducteur. Les hypothèses faites dans ce but, que Kant critique sous le nom d'idées de la raison, ne servaient à vrai dire qu'à élever au rang de réalité unique et suprême le simple phénomène, [...] le monde des apparences de Platon, et ce, afin de le substituer à 1'essence intime et véritable, et de rendre impossible la vraie connaissance de cette dernière, c'est-à-dire, en un mot, pour plonger les rêveurs dans un sommeil encore plus profond. Kant montra que ces lois, et par suite le monde lui-même, sont conditionnés par le mode de connaissance du sujet. D'où il découlait qu'aussi longtemps que l'on continuerait à faire des recherches et des déductions au fil directeur de ces lois, on ne ferait aucun pas en avant dans la question capitale, à savoir dans la connaissance de l'essence du monde tel qu'il est en soi et sans représentation, mais on tournerait comme l’écureuil dans sa roue.

En gros, si je résume :
Les principes fondamentaux (temps, espace, causalité, syllogisme) ne sont que des formes de notre intellect : "Avant Kant, nous étions DANS le temps. Maintenant, c'est le temps qui est en nous". Par conséquent, ces principes ne s'applique qu'à nos représentations des choses (phénomènes), mais en aucun cas à la chose en soi. Toute métaphysique (qui est la science de ce qui se trouve au-delà de la possibilité de toute expérience) est donc impossible.


(*) En épigraphe de la Critique : "C'est le privilège du vrai génie, et surtout du génie qui ouvre une carrière, de faire impunément de grandes fautes" (Voltaire)

Arthur Schopenhauer, Le Monde comme Volonté et Représentation (1819)
Chronicle, Josh Trank (2012)

4 commentaires:

  1. Hahaha. Tout ça c'est pour que j'apparaisse en porte-jaretelles, avoue ! Boobs and Brains, Brains and Boobs

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  2. He he, oui, j'y ai pensé après coup.

    Mais tu sais que j'ai justement déjà évoqué Spinoza ici à plusieurs reprises? (sans qu'aucune apparition spontanée n'en aie pour autant résulté...)

    Sinon, belle maîtrise de l'html, je suis très fier ;-)

    -Et bienvenue ici, alors-

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  3. Rectificatif, tu t'es gourée dans le copier-coller de l'adresse... Je suis sympa, alors je mets le bon lien.

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  4. Ah ben non, je ne maîtrise pas du tout, alors... mais je suis un peu une quiche, pour ces trucs-là, faut pas m'en vouloir.
    Sinon c'est la première fois que je commente mais je te lis, parfois, tu sais.

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