dimanche 29 mai 2011

We are rising

"we are rising", un volume électro de Top Tape a été diffusé dimanche dernier
(toujours à 19h, toujours sur Radio Campus Paris).

L'émission est en ligne depuis quelques jours maintenant à cette adresse.

Vous y croiserez 13&God, Notwist, Cex, Apparat, haushka et plein d'autres choses.

Enjoy.

mardi 24 mai 2011

Mon corps s'était dissous dans les ténèbres

Quand pour la dernière fois vous êtes-vous senti plongé dans les "ténèbres"?

Les ténèbres étaient d'une densité terrifiante.
Impossible de discerner le moindre contour dans cette muraille d'encre. Je ne voyais pas mon propre corps. Il était difficile d'imaginer qu'il pût y avoir quoi que ce fût derrière ce néant noir.
Dans des ténèbres aussi totales, on ne peut envisager sa propre existence autrement que comme un pur concept. Mon corps s'était dissous dans les ténèbres, et ce concept de "moi" sans substance flottait dans l'air comme un ectoplasme. Libéré de mon corps physique mais sans nouveau lieu où m'incarner, j'errais dans un univers de néant, sur l'étrange frontière entre rêve et réalité.
Je restai un moment figé sur place. Privé de mes sens habituels, je me sentais paralysé. Brusquement plongé au fond de l'océan. J'essayai d'adapter un peu ma vision à l'obscurité, en vain. Les ténèbres auxquelles les yeux s'habituent ne sont pas de vraies ténèbres. Ici, j'avais à faire à des ténèbres totales, sans le moindre interstice lumineux, comme d'innombrables couches de peinture noire.

Danse, danse, danse - Haruki Murakami (1988)

lundi 23 mai 2011

Keep on running in the dark

En plus de l'installation Leviathan à la Nef du Grand Palais, l'autre expo du Weekend aura été celle de Richard Prince, à la BNF. L'occasion de voir tout un tas de photos, dessins, peintures, livres, documents en lien avec l'univers de l'artiste, et aussi de contempler de nouvelles nurses...
Soit sur les couvertures de ces romans des années 50s, matériau de base de Richard Prince pour sa série, soit en peinture.


Car oui, souvenez-vous, j'abordais déjà ce sujet ici au cours de ma saga Sonic Youth, à propos de l'album Sonic Nurse.
En guise de complément, voici d'ailleurs la Dude Ranch Nurse, et les paroles de la chanson du même nom (qui gagne d'ailleurs à être réécoutée. En plus, c'est Kim Gordon qui chante).


Keep on running in the dark
Dude ranch dream has fallen apart
Stolen kisses let's pretend my friend
You play sick and I will mend
Let the action begin again
You be patient and I'll attend
Let's rehearse let's do it again
Dude ranch nurse yr brand new friend

Let nurse give you a shot
It's something to do
Took my pulse
Let nurse give you a shot
It's something to do
I could love you
I could have you
Deep sleep coming along
Like a newborn colt you found
I'll wrap it around with gauze
Dizzy reminder
Ouch, you found
Let nurse give you a shot
Don't sleep too long

You be cowboy and I'll allow
Let me ride you till you fall
Let's pretend there's nothing at all
Nobody knows the shape I'm in
Kiss me now it's just a sin
Nobody knows the shape I'm in

Sonic Youth - Dude Ranch Nurse
Sonic Nurse (Geffen, 2004)

Ces nurses en deviendrait presques inquiétantes
("Keep on running in the dark").
Surtout si elles sont ensanglantées, comme la wayward nurse.
Peut-être rappeleront-elles à d'éventuels gamers de la fin des années 90 les nurses de Silent Hill, ce jeu de survival horror...



...qui d'ailleurs comportait des références à Sonic Youth, oh la la, tout se recoupe, c'est dingue.

dimanche 22 mai 2011

la figure de l’engloutissement



D’origine biblique, le Léviathan apparaît dans le Livre de Job, le Livre d’Isaïe et certains psaumes. Il est décrit comme un animal dont « la vue seule suffit à terrasser » (Jb 41,1). A la fois gueule immense par laquelle les âmes pénètrent aux Enfers ou serpent de mer provoquant les cataclysmes, le Léviathan est souvent assimilé à la Bête de l’Apocalypse. Le motif du Léviathan est associé plus généralement au motif du serpent monstrueux que l’on retrouve dès le troisième millénaire avant Jésus-Christ dans l’iconographie sumérienne. Lui et son homologue terrestre, Béhémot, sont décrits dans la tradition sémitique comme devant être vaincu à l’heure du Jugement Dernier. Le christianisme fera du Léviathan une image du Diable, incarnant pour saint Thomas d’Aquin le démon de l’envie. Le Léviathan est surtout la figure de l’engloutissement et le générateur des vagues et des tempêtes.



Anish Kapoor
- Leviathan
Monumenta 2011
jusqu'au 23 juin 2011, Nef du Grand Palais
www.monumenta.com

[2ème photo: droits réservés Monumenta 2011]

vendredi 20 mai 2011

Forever Ago (2)



Il y a environ 3 ans (punaise, 3 ans?!), je reproduisais ici l'un des très beaux textes de Bon Iver. Je ne dois pas être le seul à trouver qu'on touche là à la poésie, puisque son label Jagjaguwar vient de publier l'intégralité des paroles du nouvel album, avant même sa sortie.

Voici la première chanson, "Perth":
(ça marche mieux en lisant à voix haute)

Iʼm tearing up, acrost your face
move dust through the light
to fide your name
it’s something fane
this is not a place
not yet awake, I’m raised of make

still alive who you love
still alive who you love
still alive who you love

in a mother, out a moth
furling forests for the soft
gotta know been lead aloft
so I’m ridding all your stories
what I know, what it is, is pouring – wire it up!

you’re breaking your ground

Bon Iver, Perth
s/t (Jagjaguwar, 2011)

jeudi 19 mai 2011

I became an enemy of society

Tandis que j'écoute le nouvel album d'Herman Dune (Strange Moosic) - après tout, je ne suis pas à l'abri d'une bonne surprise, je viens de trouver un site très complet compilant toutes les paroles de Stanley Brinks. Y figure également un lien vers l'impressionnante discographie d'André Herman Düne.

Avant peut-être de l'exploiter plus avant sur ce blog, je vous propose d'abord quelques éléments biographiques, tels qu'André nous les livre, sur la pochette de Dank U d'une part (que je trouvais tantôt au Rough Trade West), puis dans la chanson fondatrice "Stanley Brinks".

Après tout il sont rares, tant AHD boude les interviews
(et les sessions acoustiques, d'ailleurs ^_^)

I was born in Paris. My Mother was swedish but she had lived in Uganda and America. My Father was moroccan, he was a physician but he played the guitar. Soon i started singing in Spanish and English, with my little brother. In high school i took italian, my hair turned black, i started playing the straight horn and i grow a beard.
There were a few girls who liked me but i just didn’t know. I roamed suburban streets at night with Simon and Sam and only drank coffee. I also watched a lot of television and fought for the remote with my little sister.
Then i went to New York City on my own, talked to strangers, heard Ish Marquez sing, and learned about people and things. I quit reading and started making a living out of writing songs and playing shows.
One morning in 2006 i had a beer with my friend dominic in Berlin and he suggested that i call myself Stan : i immediately thought that was a very good idea. Europe was still a rather free country, you could do whatever you wanted.

La chanson maintenant, qui reprend certains des éléments ci-dessus:

In the summer of nineteen seventy-three
A boy was born and that boy was me
Born with blue eyes and blond hair
And relatives and origins everywhere

My mother was quiet and educated
She travelled the world, she studied and painted
She used the french that she was reading
And never made it back to sweden

My father was a doctor but he played the guitar
On the day that you are born, you know who you are
He gave me the name of my late grandfather
One goes down and up comes the other

When i was a younger man i drank a lot of coffee
I studied biology and philosophy
The only thing i learned was what no one said to me
You better live now and stop getting ready

I played in a band, we toured the old world
The shows were exciting, fun and unheard
I loved the spirit, i loved the UK
And chilling with my friends by the side of the highway

I loved the movies, i loved the ocean
I liked the idea of an orphan nation
So i flew to the city to catch up with a friend
I met a few songsters and a lot of good men

In the fall of two thousand six
I changed my name to Stanley Brinks
I turned my back on friends and family
And became an enemy of society



Stanley Brinks, Stanley Brinks
Dank U (2007)

http://www.stanbrinkssongs.toile-libre.org/

PS: Pendant ce temps... RAS du côté de l'album de Strange Moosic.
A sauver tout de même: #10, 12

mercredi 18 mai 2011

Sourire n°16

A la réception de l'hôtel du Dauphin.

- Excusez-moi. Attendez un instant, dit-elle, puis elle disparut dans le fond.
Au bout de trente secondes elle revint accompagnée d'un quadragénaire en vêtements noirs. A vie de nez, il avait l'air d'un professionnel de l'hôtellerie. J'ai déjà rencontré plusieurs fois ce genre de personnages au cours de mon travail. Ce sont des gens étranges, qui en général sourient toujours, et ont à leur disposition une panoplie d'environ vingt-cinq sourires différents, en fonction des circonstances. Du sourire froid et poli au sourire de satisfaction réprimé. Cette gradation de sourire est numérotée de 1 à 25. Et ils les choisissent comme d'autres les clubs de golf, selon la circonstance. Voilà le genre d'homme que c'était.
- Bienvenue, monsieur, dit-il en inclinant poliment la tête et en m'adressant un sourire moyen.
Mes vêtements ne semblèrent pas lui faire très bonne impression, et son sourire baissa d'au moins trois degrés.

Danse, danse, danse - Haruki Murakami (1988)

mercredi 11 mai 2011

I wanted someone to enter my life



I wanted someone to enter my life like a bird that comes into a kitchen and starts breaking things and crashes with doors and windows, leaving chaos and destruction. This is why I accepted her kisses as someone who has been given a leaflet at the subway. I knew, don't ask me why or how, that we were gonna share even our toothpaste. We got to know each other by caressing each other's scars avoiding getting too close to know too much. We wanted happiness to be like a virus that reaches every place in a sick body. I turned my home into a water bed and her breasts into dark sand castles. She gave me her metaphors, her bottles of gins and her North Africa stamp collection. At night we would talk in dreams, back to back and we would always, always, agree. The sheets were so much like our skin that we stopped going to work.

Love became a strong big man with us, terribly handy, a proper liar, with big eyes and red lips. She made me feel brand new. I watch her get fucked up, lose touch, we listened to Nick Drake in her tape recorder and she told me she was a writer. I read her boook in two and a half hours and cried all the way through as watching Bambi. She told me that when I think she has loved me all she could, she was gonna love me a little bit more. My ego and her cynicism got on really well and we would say "what would you do in case I die" or "what if I had Aids ?" or "don't you like the Smiths" or "let's shag now". We left our fingerprints all around my room, breakfast was automatically made, and if it would come to bed in a trolley, no hands, we did compete to see who would have the best orgasms, the nicer visions, the biggest hangovers. And if she came pregnant we decided it would be God hand's fault. The world was our oyster. Life was life. But then she had to go back to London, to see her boyfriend and her family and her best friends and her pet called "Gus". And without her I've been a mess. I've painted my nails black and got my hair cut. I open my pictures collection and our past can be limitless and I know the process is to slice each section of my story thinner and thinner until I'm left only with her, I've felt like shite all the time no matter who I kiss or how charming I try to be with my new birds. This is the point, isn't it ? New birds that will project me along a wire from the underground into the air, into the world.

Migala, Gurb Song (d'après un poème de Tim Dlugos)
asi duele un verano (acuaerala, 1999)

dimanche 8 mai 2011

Don't fall in love

Voici une pochette que j'aime beaucoup, que je n'avais pas pris le temps de publier jusqu'alors:

Il s'agit de Still Corners, groupe que je citais à la fin de l'année 2010, dans la catégorie espoir. Ils sont désormais signés chez Sub Pop, et un album devrait suivre.

En attendant, voici un nouveau chapitre de la série Crossed Covers. Vous pouvez bien entendu le compléter, si vous connaissez des pochettes d'album dans un esprit similaire.

Still Corners, Don't fall in love (single, 2010)
http://stillcorners.bandcamp.com/
Vampire Weekend, Contra (Matador, 2010)
Dum Dum Girls, I Will Be (Sub Pop, 2010)
Kids of 88, Sugarpills (PID, 2010)
Love Inks, ESP (hell yes!, 2011)

[Edit:]
Arab Strap, Mad for Sadness (Chemikal Underground, 1999)
Teens, Teens (s/r, 2011)

jeudi 5 mai 2011

Perversion Discrète

Dimanche aura déjà lieu un nouveau volume de Top Tape. Le programme n'est pas établie, mais peut-être y ferai-je gagner des albums de Tune-Yards, si j'arrive à en insérer un morceau dans une mixtape qui se tienne.

A voir.

Dernièrement, vous avez en tout cas pu entendre le Vol.13 de la saison en cours, avec uniquement des groupes made in France (+ malajube).

A écouter ici, avec d'ailleurs des albums de We Are Enfant Terrible à la clef.

Sans ça, près d'un an après un premier loupé, j'ai pu recevoir en session Jordan Geiger (des regrettés Minus Story).

Une photo plus bas, quant au son, ce sera diffusé un peu plus tard sur Radio Campus Paris. Vous pouvez dans tous les cas vous pencher sur son nouvel album sous le nom d'Hospital Ships: Lonely Twin


mardi 3 mai 2011

Il en est ainsi de notre passé

Je dépose les armes.

Je me croyais prêt à lire "A la recherche du temps perdu", mais j'abandonne, page 188 (sur les quelques 2400 que comptent mon édition "tout-en-un"), sans même avoir achevé "Du côté de chez Swann".

Proust a écrit:
J’ai eu le malheur de commencer mon livre par le mot « je » et aussitôt on a cru que, au lieu de chercher à découvrir des lois générales, je m’analysais au sens individuel et détestable du mot.

Je dois avouer qu'en ces premières pages, l'universel ne m'est apparu qu'en de rares occasions...

Alors, comme trace de ce premier essai, je me contenterai de citer le passage suivant, qui précède d'ailleurs celui de la madeleine, que je publiais un jour d'avril 2008.


Je trouve très raisonnable la croyance celtique que les âmes de ceux que nous avons perdus sont captives dans quelque être inférieur, dans une bête, un végétal, une chose inanimée, perdues en effet pour nous jusqu’au jour, qui pour beaucoup ne vient jamais, où nous nous trouvons passer près de l’arbre, entrer en possession de l’objet qui est leur prison. Alors elles tressaillent, nous appellent, et sitôt que nous les avons reconnues l’enchantement est brisé. Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous.
Il en est ainsi de notre passé. C'est peine perdue que nous cherchions à l'évoquer, tous les efforts de notre intelligence sont inutiles. Il est caché hors de son domaine et de sa portée, en quelque objet matériel (en la sensation que nous donnerait cet objet matériel), que nous ne soupçonnons pas. Cet objet, il dépend du hasard que nous le rencontrions avant de mourir, ou que nous ne le rencontrions pas.

Marcel Proust, À la recherche du temps perdu
- Du côté de chez Swann (1913)

dimanche 1 mai 2011

Dent pour dent, œil pour œil

Ici souffrit le pauvre Antoine Doinel, puni injustement par Petite Feuille pour une pin-up tombée du ciel. Entre nous ce sera dent pour dent, œil pour œil.



Les 400 coups, François Truffaut (1959)