jeudi 23 janvier 2020

Mes plus beaux souvenirs de l'espèce humaine

Paroles de Bruit Noir (feat. Pascal Bouaziz de Mendelson),
groupe au nom programmatique.

Tu connais l'histoire de l'animal le plus intelligent? Enfin... c'est pas vraiment une histoire, c'est dans... Plutarque. Bon, Plutarque, évidemment, c'est un peu osé comme référence mais vu les gens qui écoutent ce titre, je me dis qu'on peut peut-être un peu repousser les limites.

L'autre jour, je regarde "La Planète des Singes" - Bon, ça, ça va comme référence? - et je me dis :
Qu'arrive enfin la planète des rats ! Qu'arrive enfin la planète des cafards ! Qu'arrive la planète des fourmis ! (Tu crois que eux, ils achèteront le disque ?)

Le passage le plus émouvant du cinéma mondial des vingt dernières années c'est dans "Fantastic Mister Fox", quand le renard depuis l'autre coté de la vallée salue le loup de son poing levé, signe de ralliement des animaux sauvages, signe de ralliement des animaux sauvages, le vieux "No Pasaran" réactualisé.



Les êtres humains ne passeront pas
Les êtres humains ne passeront pas
Les êtres humains ne passeront jamais

Ce passage, c'est aussi beau et aussi triste que la guerre d'Espagne dans le bouquin si triste d'Hemingway. Il ne souhaite plus qu'une seule chose à souhaiter au renard, au blaireau et au loup, c'est que nous les franquistes nous disparaissions avant vous.

Il paraît qu'on peut comparer la prolifération de l'espèce humaine sur la Terre à celle d'un cancer généralisé. Ça m'étonne pas vraiment que ça marche pareil, les êtres humains sur la Terre et les cancers. Ça me rassure un peu de pas être le seul à avoir ce même genre d'idée. Moi, les plus beaux souvenirs de l'espèce humaine, c'est quand je partais tout seul en randonnée hors saison en
montagne et que j'en voyais pas un seul spécimen de toute la journée.

Et tout ce temps-là, je guettais les animaux sauvages
J'espérais les animaux sauvages
J'attendais les animaux sauvages
C'est tellement beau les animaux sauvages

Comme le surfeur d'argent qui leur parle dans leur langue-même. Moi j'espérais parler aux animaux sauvages. C'est tellement beau les animaux sauvages. Galactus, le mangeur de mondes, tu te souviens dans la même BD, c'est juste une image de la mort qui nous vient, une métaphore de ce qui nous attend juste là demain. Galactus, c'est la logique en marche d'une civilisation de crétins, le train que personne n'arrête et qui fonce à pleine vitesse dans le ravin et moi, comme le pauvre surfeur d'argent, je vois tout d'avance et j'y peux rien. Comme dans "La Planète des Singes", je peux plus voir le film, je connais déjà la fin

Et je guette les animaux sauvages
C'est tellement beau les animaux sauvages
C'est tellement beau l'immense étrangeté du regard des animaux sauvages
Qui te regardent comme un objet, comme un animal étrange toi-même
Et probablement très mal habillé

L'homme est un animal nuisible que les autres espèces auraient mieux fait d'éradiquer, comme on clouait les chouettes sur les portes, les chouettes auraient mieux fait de nous clouer.

Y a tellement plus de beauté chez les animaux sauvages
Y a tellement plus de fierté et de liberté dans le regard d'un rat même faisant les poubelles dans l'obscurité que dans le tien scotché devant tes séries américaines

C'est tellement beau qu'il reste encore des animaux sauvages
C'est tellement surprenant que ce soit encore autorisé
C'est tellement surprenant que ce soit encore autorisé la beauté
C'est tellement surprenant que ce soit encore autorisé la beauté

Tu sais où y a plein d'animaux sauvages? Où ils sont bien tranquilles? A Tchernobyl. C'est bizarre qu'ils organisent pas des randos là-bas, genre safari à Tchernobyl. Moi j'irais bien voir les animaux sauvages à Tchernobyl, et puis j'irais bien m'installer là-bas moi aussi, tiens pendant que j'y suis, genre comme dans "Stalker", le film de Tarkovski. Bon, Tarkovski comme référence, j'entends, c'est un peu osé mais bon, vu les gens qui écoutent ce titre, je me dis qu'on peut peut-être encore un peu repousser les limites.

Tu connais l'histoire de l'animal le plus intelligent?
Tu la connais?

Bruit Noir - les animaux sauvages
II / III (Ici d'ailleurs, 2019)

Ernest Hemingway, Pour qui sonne le glas (1940)
Plutarque, l'intelligence des animaux
Andrei Tarkovski, Stalker (1979)
Franklin J. Schaffner, La Planète des singes (1968)

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Beaucoup de références dans ce morceau, dont deux films dont les images ont marqué semble-t-il plus d'un esprit. Dans "Stalker", les personnages se rendent dans "la Zone", lieu déserté d'un désastre passé. "La zone", c'est aussi le terme qu'emploient les témoins de Tchernobyl dans le livre dont je publie ici des extraits en ce moment La Supplication. Je pense notamment au témoignage d'un groupe de liquidateurs-chasseurs, encore hantés par leur mission d'abattre en masse animaux sauvages comme domestiques dans le périmètre de contamination (cf. chapitre "trois monologques sur "la poussière qui marche" et "la terre qui parle")

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