Dans une série de courts textes, récemment portés à la scène au 104, Olivia Rosenthal discourt cinéma... Ou plutôt "films". Dans un style direct, la narratrice distille le fil de ses pensées, en réaction au (re)visionnage de films célèbres : Alien, Bambi, ou par exemple ici les Oiseaux.
Après s'être interrogée sur ce qu'ôte ou apporte la répétition d'une projection d'un film d'angoisse, elle s'attarde plus précisément sur notre réaction face à la peur...
Je ne sais pas si j'ai moins peur aujourd'hui qu'hier, je ne sais pas si les adultes sont plus forts que les enfants, ils sont seulement plus contrôlés, plus éduqués, plus adaptés, plus plastiques. Je suis plastique. Je m'adapte à mon environnement et si les oiseaux attaquent je ne hurle pas comme une bête, je me cache et je cherche des solutions. Aucune solution. Le film n'apporte aucune solution. On ne résout pas la peur. On ne surmonte pas la peur. On essaye juste de la sortir de soi et de courir plus vite qu'elle pour la laisser en arrière. On court jusqu'à ce qu elle soit minuscule, là-bas, dans le paysage. Et adulte on est plus grand, plus musclé, on court plus vite. On apprend plus vite à reconnaître dans certaines de ses réactions les symptômes d'une frayeur à venir, on apprend plus vite à contenir ces symptômes afin qu'ils n'envahissent pas toutes les ressources dont on dispose. On délimite. On veille. Et dès que la peur sort sa petite tête hideuse, on prend ses affaires et on s'en va. On lui laisse tout. Les meubles, les photographies, la maison, on lui abandonne la place. Le plus important, c'est de survivre. Tout le reste est superflu.
Olivia Rosenthal, Les oiseaux reviennent (2016)
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