dimanche 20 octobre 2024

Lois de la robotique


"Contes et légendes" de Joël Pommerat n'est pas une pièce "sur" les robots, mais "avec" des robots. L'auteur exploite ce contexte futuriste plausible pour interroger l'humanité de ses personnages.

Comme toute histoire un minimum bien écrite faisant intervenir ces créations humanoïdes, elle cependant touche du doigt des sujets assez vertigineux, dès lors qu'on prend le temps de la réflexion.

Qui a étudié Frankenstein de Mary Shelley (1818), se rappellera les idées préalables ayant nourri l'imagination de l'autrice : le golem du folklore juif, le galvanisme... Plus tard, Karel Čapek, un auteur tchèque emploiera le terme "robot" (inventé par son frère) pour la première fois dans la pièce de théâtre "R. U. R. (Rossum's Universal Robots)" (1920).

Elle raconte l'histoire de robots qui se révoltent contre les hommes et les exterminent tous. À la fin de la pièce, après avoir perdu le secret de leur fabrication, deux d'entre eux découvrent l'amour, et le dernier être humain leur remet la responsabilité du monde.

Si les interrogations existentialistes apparaissent dès le premier écrit avec des robots, c'est qu'elles découlent du concept même. On découvre, enfant, les robots sous le prisme technologique, mais leur essence est d'être des créatures fabriquées "de toute pièce".

Puisque le robot peut être un danger (et on pourra se reporter aux discussions actuelles sur l'IA), Isaac Asimov gravera dans le marbre, en 1942, ses trois fameuses lois de la robotique, qui seront reprise par tout auteur ou toute oeuvre postérieur(e).
  • Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ;
  • Un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la première loi ;
  • Un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n'entre pas en contradiction avec la première ou la deuxième loi.
Plus proche de nous, on pourra se souvenir de la série "Real Humans" (discutée dans ces colonnes, et référence de Joël Pommerat) et surtout regarder l'excellent animé Pluto (feat. un certain Astro). Y sont soulevés dans une histoire haletante les thèmes du libre-arbitre, des sentiments (amour, tristesse, peur de la mort, haine), de la violence envers la race humaine, les possibilités d'effacement/altération de la mémoire...



Joël Pommerat, Contes et Légendes (2020)
 Toshio KawaguchPluto (2023)
Lars Lundström, Real Humans (2013-2014)

jeudi 17 octobre 2024

Demain est annulé

[rero, 2023]

De l'exposition "Demain est annulé..." (titre percutant - quoique barré - sur fond de warming stripes), je retiens les idées que :
- l'Humain doit se réaliser autrement que par l'accumulation de biens (changer de paradigme nécessite bien sûr un effort commun considérable)
- il ne faut pas nécessairement arrêter le progrès mais le ré-orienter

Sur ces sujets, lire les deux textes suivants :

La sobriété, c'est rééquilibrer complètement les différentes dimensions de l'existence alors qu’aujourd’hui on privilégie la consommation dans tous les domaines, matière, énergie espace et destruction de la nature. La sobriété en l’espèce consiste à reconstruire une aménité avec la nature : si elle amène à faire moins, voire beaucoup moins, elle n’est ni une ascèse ni un rétrécissement. Ce qu’on peut perdre en accumulation de biens matériels, on peut le récupérer par une vie plus intense, sans doute plus agréable et dans un lien rétabli avec le milieu naturel.
C'est là qu’on peut parler de spiritualité. Dans toute société on a favorisé un mode de réalisation de soi, un mode de développement de son humanité. On réalise aujourd’hui cette humanité en accumulant des biens pour acquérir un statut, au risque de détruire nos conditions de vie. Nous n’échapperons donc
pas à la redéfinition d’un nouveau mode d’accomplissement de soi, dans une reconnexion avec la nature. Celle-ci doit être riche de sens et surtout plurielle car nous vivons et devons vivre dans une société démocratique où les choix sont libres : il y aura des modes différents de spiritualité.

Dominique Bourg

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[...] Nous pouvons repenser les objectifs que visent [l]es innovations, faire en sorte qu’elles servent un progrès à la fois social, politique et écologique. C'est par exemple l'orientation low-tech, en opposition à la high-tech, qui vise la recherche de techniques plus respectueuses de l’environnement et des avancées au bénéfice du plus grand nombre. 
La question se pose alors des chemins que nous emprunterons tous ensemble : Quelles sont nos priorités en matière d’innovation ? Que faire des technologies déjà à notre disposition ? Que voulons-nous garder et à quoi souhaitons-nous renoncer ?