Yasmina Reza saupoudre ses romans de références visuelles, qu'il s'agisse de peintures (Hopper...), de prises de vue de photographes célèbres (Robert Frank en tête) ou anonymes :
En haut, il y a la toute petite tête de l'enfant. Une nuque chauve à l'exception d'une traîne de queue au milieu, des oreilles décollées, des cheveux noirs épars et filasses. Quel âge a-t-elle ? Cette robe ne lui va pas du tout. On l'a attifée et sortie dans la nuit. Je me suis tout de suite associée à cette forme en blanc embarquée pour des années de honte. Quand j'étais enfant on me faisait jolie. Je comprenais que je ne l'étais pas à l'état naturel. Mais on ne doit pas endimancher une enfant ingrate. Elle se sent anormale. Je trouvais que les autres enfants étaient harmonieux. Moi je me sentais ridicule avec des habits de vieille qui m'empêchaient de gigoter, des cheveux constamment courts (ma mère a interdit toute mon enfance les cheveux longs), aplatis en arrière avec la barrette pour contrecarrer la frisure et dégager le front. [...] Ma mère voulait que je présente bien. Ça voulait dire propre, léchée, engoncée et laide.
Yasmina Reza, Babylone (2016)
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