jeudi 28 avril 2011

Si l'on savait

Outre sa force émotionnelle, le passage que je relevais hier des Trois soeurs de Tchekhov laisse émerger deux thèmes intéressants:
Le travail et la foi, et deux positions qui méritent d'être entendues.


"en attendant, il faut vivre... il faut travailler, travailler..."
Le travail, comme émancipation, plutôt qu'aliénation. Mes lecteurs réguliers savent ce que j'en pense (exprimé par André Breton, ici: http://arise-therefore.blogspot.com/2009/08/le-sens-de-la-vie.html).

Irina aura développé un peu plus tôt:
Vous dites: la vie est belle. Oui, mais si c'était une erreur? Pour nous, les trois soeurs, la vie n'a pas été belle, elle nous a étouffées, comme une mauvaise herbe... [...] Il faut travailler, il faut travailler! Si nous sommes tristes, si nous voyons la vie en noir c'est parce que nous ignorons le travail. Nous sommes nées de gens qui le méprisaient...

Sans doute des rentiers.
A vrai dire, on la comprend. D'autant qu'en tant qu'enseignante, elle exerce une profession valorisante et utile. Le travail, tel que celui des paysans lui apparaîtrait pourtant moins enviable, même à cette période située entre la fin du sevrage (1861) et le début du kolkhoze (1917)


"Un peu de temps encore, et nous saurons pourquoi cette vie, pourquoi ces souffrances... Si l'on savait! Si l'on savait!"
Derrière cette exhortation, se cache naturellement l'idée d'une destinée, de Dieu.
On peut cette fois citer Macha :

Il me semble que l’homme doit être croyant, ou s’efforcer de l’être, sans quoi sa
vie est vide, vide... Vivre et ne pas savoir pourquoi les grues volent, pourquoi les enfants
naissent, pourquoi il y a des étoiles dans le ciel... Soit on sait pourquoi l’on vit, soit tout
n’est que du vent.

Sans foi, point de sens à donner à la vie. Macha serait alors tout aussi perdue qu'Ivan Karamazov prononçant cette célèbre phrase : "Si Dieu est mort, tout est permis". Car cette fois, c'est la morale qui ne survivrait pas à l'absence d(e l'idée d)'un Dieu.
(Ce qui se discute, évidemment).


Ces sujets de réflexions étant amorcés, le mot de la fin, en guise de réponse à Macha, sera aburde ou ne sera pas, et il revient à l'excellent Hector de la Vallée:


Tchekhov, Les trois soeurs (1900)

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