mercredi 30 avril 2008

Forever Ago

C'est juste très bien écrit. Des poèmes à la musicalité évidente.
"Bon hiver"!

.


someday my pain, someday my pain
will mark you
harness your blame, harness your blame
and walk through

with the wild wolves around you
in the morning, I'll call you
send it farther on

solace my game, solace my game
it stars you
swing wide your crane, swing wide your crane
and run me through

and the story's all over you
in the morning i'll call you
can't you find a clue when your eyes are all painted Sinatra blue

what might have been lost -
don't bother me

Bon iver - the wolves (act I and II)
for Emma, forever ago (Jagjaguwar, 2008)
www.myspace.com/boniver

mardi 29 avril 2008

l'effet madeleine (dans le texte)

J'en parlais dans un mail tout à l'heure... de l'effet madeleine. Voilà ce qu'il y a derrière cette expression cliché


II y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n'existait plus pour moi, quand un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d'une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. II m'avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse : ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elle était moi. J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D'où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu'elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu'elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D'où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l'appréhender ? Je bois une seconde gorgée où je ne trouve rien de plus que dans la première, une troisième qui m'apporte un peu moins que la seconde. II est temps que je m'arrête, la vertu du breuvage semble diminuer. Il est clair que la vérité que je cherche n'est pas en lui, mais en moi. [...] Je pose la tasse et me tourne vers mon esprit. C'est à lui de trouver la vérité. Mais comment ? Grave incertitude, toutes les fois que l'esprit se sent dépassé par lui-même ; quand lui, le chercheur, est tout ensemble le pays obscur où il doit chercher et où tout son bagage ne lui sera de rien. Chercher ? pas seulement : créer. II est en face de quelque chose qui n'est pas encore et que seul il peut réaliser, puis faire entrer dans sa lumière. Et je recommence à me demander quel pouvait être cet état inconnu, qui n'apportait aucune preuve logique, mais l'évidence, de sa félicité, de sa réalité devant laquelle les autres s'évanouissaient. Je veux essayer de le faire réapparaître. Je rétrograde par la pensée au moment où je pris la première cuillerée de thé. Je retrouve le même état, sans une clarté nouvelle. Je demande à mon esprit un effort de plus, de ramener encore une fois la sensation qui s'enfuit. Et, pour que rien ne brise l'élan dont il va tâcher de la ressaisir, j'écarte tout obstacle, toute idée étrangère, j'abrite mes oreilles et mon attention contre les bruits de la chambre voisine. Mais sentant mon esprit qui se fatigue sans réussir, je le force au contraire à prendre cette distraction que je lui refusais, à penser à autre chose, à se refaire avant une tentative suprême. Puis une deuxième fois, je fais le vide devant lui, je remets en face de lui la saveur encore récente de cette première gorgée et je sens tressaillir en moi quelque chose qui se déplace, voudrait s'élever, quelque chose qu'on aurait désancré, à une grande profondeur ; je ne sais ce que c'est, mais cela monte lentement ; j'éprouve la résistance et j'entends la rumeur des distances traversées. Certes, ce qui palpite ainsi au fond de moi, ce doit être l'image, le souvenir visuel, qui, lié à cette saveur, tente de la suivre jusqu'à moi. Mais il se débat trop loin, trop confusément ; à peine si je perçois le reflet neutre où se confond l'insaisissable tourbillon des couleurs remuées ; mais je ne peux distinguer la forme, lui demander, comme au seul interprète possible, de me traduire le témoignage de sa contemporaine, de son inséparable compagne, la saveur, lui demander de m'apprendre de quelle circonstance particulière, de quelle époque du passé il s'agit. Arrivera-t-il jusqu'à la surface de ma claire conscience, ce souvenir, l'instant ancien que l'attraction d'un instant identique est venue de si loin solliciter, émouvoir, soulever tout au fond de moi ? Je ne sais. Maintenant je ne sens plus rien, il est arrêté, redescendu peut-être ; qui sait s'il remontera jamais de sa nuit ? Dix fois il me faut recommencer, me pencher vers lui. Et chaque fois la lâcheté qui nous détourne de toute tâche difficile, de toute oeuvre importante, m'a conseillé de laisser cela, de boire mon thé en pensant simplement à mes ennuis d'aujourd'hui, à mes désirs de demain qui se laissent remâcher sans peine. Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût, c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté ; peut-être parce que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d'autres plus récents ; peut-être parce que, de ces souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s'était désagrégé ; les formes - et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel sous son plissage sévère et dévot - s'étaient abolies, ou, ensommeillées, avaient perdu la force d'expansion qui leur eût permis de rejoindre la conscience. Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir.

Marcel Proust, À la recherche du temps perdu. Du côté de chez Swann (1913)
www.myspace.com/proustmarcel

dimanche 20 avril 2008

Give me Wings

Booth and the Bad Angel, album sous-estimé réunissant Tim Booth (James) et Angelo Badalamenti (compositeur des B.O. de Lynch). On cherche encore le lien. J'ai l'ai ré-écouté plusieurs fois ces derniers jours. Des paroles assez mystiques, ici


What a journey
So hard to describe
Your harbour so small
The ocean so wide
Spin the wheel, spin the wheel
Go wherever she spins
Surrender to this wave that's rolling in

Homing fingers
Starting to dig

Raising expectations
Lifting the lid
There's a show going down
Going deeper within
I long to lose myself
Inside your skin

What a feeling under the stars
My body's rotating from Venus through Mars
There's a war going on
between my head and my heart
I wonder how they grew
So far apart

I'm so shaken, about to explode
The myth of kissing princes
is they turn into toads
There's a war going on
between the sun and the moon
Before they come to terms we'll be consumed

Oh my god, please take me now
I'm ready for ascension
If I only knew how
Give me wings give me wings
Now I'm stuck on the ground
Receive this blood and bones
I'm homeward bound

See the statue growing wings
This singer was a virgin
Until he conceived
God is love, God is love
And her lover I'll be
I long to leave the world in ecstacy

Dance with me around this fire
The dance of bad angels who'd love to fly higher
God is love, God is love
And her lover I'll be
I long to lead the world in ecstacy


Tim Booth & Angelo Badalamenti - the dance of bad angels
Booth and the Bad Angel (1996, Mercury)
www.myspace.com/jamesisnotaperson

dimanche 13 avril 2008

Everyday is like Sunday

Trudging slowly over wet sand
back to the bench where your clothes were stolen
this is the coastal town
that they forgot to close down
Armageddon - come Armageddon!
Come Armageddon! Come!

Everyday is like Sunday
everyday is silent and grey

Hide on the promenade
scratch out a postcard :
"how I dearly wish I was not here"
in the seaside town
...that they forgot to bomb
Come! Come! Come - nuclear bomb!

Everyday is like Sunday
everyday is silent and grey

Trudging back over pebbles and sand
and a strange dust lands on your hands
(and on your face)

Everyday is like Sunday
"Win Yourself A Cheap Tray"
share some greased tea with me
everyday is silent and grey

Morrissey - Everyday is like Sunday
Bona Drag (EMI, 1990)
www.myspace.com/morrissey

Saturday(s)

On a déjà parlé dans ces colonnes des lundis matins. Quant aux Samedis...