samedi 30 mars 2013

La génération des petites meufs

Aujourd'hui, je suis allé pour la première fois ever au centre commercial de place d'Italie... Ce qui n'était pas le but en soi, m'empressé-je de préciser, je patientais juste au chaud, en attendant l'ouverture d'un magasin alentours.

On pourrait trouver tout un tas de lieux que des chansons ont durablement liés à leur auteur (je sais pas moi, le Chelsea Hotel, la rue des cascades, le café des délices, le L-Train...). Sous cet angle, le Mac Do place d'It (et dans une moindre mesure Zara) ramène(nt) forcément à Stupeflip.
MacDo d'la place d'It', j'le connais par coeur,
j'connais les sandwiches par coeur:
Cheeseburger, Royal cheese, Filet-o-fish.
Bacon, j'le prend plus j'ai dépassé la dose.
Dans une interview aux Inrocks que je découvre aujourd'hui, Julien Barthélémy (aka King Ju) complète :
Le XIIIe arrondissement, c’est chez moi. J’y vis depuis trente-sept ans, je suis au-delà du dégoût.
Cette expédition notoire me pousse aujourd'hui à publier un article longtemps resté à l'état de brouillon. Il s'agit de paroles que j'avais retranscrites à partir du morceau caché de l'EP "Terrora" paru en septembre dernier, lui-même accompagnant la sortie d'un DVD live.

Ce qui avait retenu mon geste, c'est le caractère imparfait du texte (des répétitions balourdes, des phrases pas forcément pertinentes, une progression relevant d'avantage de l'écriture automatique, et un absence de conclusion). En résumé, il s'agit d'un morceau non-fini (ce qui est cohérent avec la manière dont il a été publié).
Je me contente donc ici d'en citer certains fragments.


Le texte est écrit, "en plein creux de la vague stup" (en 2009), à la terrasse d'un café ("le Coche -croisement Tobliac / avenue de Choisy"). King Ju y ingurgite café et sandwich saucisson, écrit vraisemblablement ce texte, tout en regardant passer les gens :

La génération des petites meufs
Elles sont toutes si fines, elles ont toutes des petites bottes courtes
Et leur mec, c"est un peu moi
Car ils ont les mêmes fringues que moi
Genre des blousons Zara
Parce que j'y passe mon temps, au Zara Place d'It, depuis la fin de Stupeflip
Tu sais ces petits blousons près du corps
J'ai passé toute ma vie à les chercher
Et maintenant n'importe quel connard l'a
Alors que dans les années 90 ils avaient tous des gros blousons de merde

Hé hé
(oui, je trouve ça drôle. Tout comme les anecdotes relatives à sa vie de chômeur)

Avec le système RSA, faut accepter les boulots pourris
Même avec des trajets de deux heures, genre Boissy-St-Léger
Mais je prendrai pas une gratte sèche pour faire un truc genre
"toi + moi + tous ceux qui le veulent" (*)
[...]

Ce matin à la cellule Appui Artistes Insertion
Ils m'avaient convoqués à neuf heures du matin
Y avait trois personnes pour nous juger,
Les artistes entre guillemets du XIIIe
Alors quand c'était mon tour, fallait qu'on dise ce qu'on a fait
Et moi j'ai dit j'ai fait Stupeflip,
Et là y avait des gars qui connaissaient
" Quoi? King Ju au RMI?
Mais c'est pas croyable !? "

La suite? De l'anecdote, on ne saura pas, mais en ce qui concerne le groupe, ça se passera en 2011 :
35'000 albums vendus, une tournée de 46 concerts pour plus de 80'000 spectateurs (à Paris: 2 Bataclan et 1 Olympia complets)

Stupeflip, Visions
Terrora (2012)

(*) tout le monde a identifié la chanson criminelle d'un certain "Grégoire"?

jeudi 28 mars 2013

Il ne faut pas confondre

Sally Shapiro, chanteuse suédoise du duo italodisco du même nom

 et Binki Shapiro, de LA,
qui vient de sortir un disque en duo avec Adam Green
après avoir mis un terme à Little Joy (en même temps qu'à sa relation avec Fabrizio Moretti des Strokes)
(Chouette album, par ailleurs)

Sally ShapiroSomewhere Else (Paperbag, 2013)
Adam Green + Binki Shapiro, s/t (Rounder, 2013)
Little Joy, s/t (Rough Trade, 2008)

lundi 25 mars 2013

You said I am an empty page to you

Si beaucoup de personnes considèrent comme déprimante la moindre musique en mineur (ou un poil lente) et évitent avec soin tout contact prolongé, mon humeur à moi n'a jamais été affectée pour une musique trop triste, soit que ma jovialité soit indestructible, ou qu'au contraire un taux constant de mélancolie coulant dans mes veines m'immunise contre toute baisse d'humeur (je n'ai pas la réponse).

Ca ne m'empêche bien entendu pas de ressentir la beauté d'une chanson, ou d'être profondément touché.

Là, j'avoue, avec la disparition de Jason Molina, que ce morceau (candidat légitime à l'élection de la plus belle chanson du monde - j'en ai un certain nombre en réserve) a tendance à me plomber un peu.

Malgré cela, je l'ai écouté tout un tas de fois ces derniers jours (via youtube ; il faut dire que mes albums de Songs: Ohia sont tout au fond d'un carton de déménagement).
Je le partage avec vous ce soir (avec ses paroles).


Death as it shook you
You gave it a fool's look
You said I am an empty page to you
Give me your hand, give me you blood
Don't misunderstand
I once had all the words
I forgot all the words
Held the binding lightning
Began to burn away
We began to burn away
Held the binding the lightning
began to burn away
the body burns away

Songs: Ohia, the body burned away
Ghost Tropic (Secretly Canadian, 2001)



[Edit : J'apprends à l'instant que le label Graveface publiera le 24 avril prochain un tribute à Jason Molina. Le disque s'appelera "Weary Engine Blues", et l'argent récolté ira à la famille du défunt. Figurent dores-et-déjà dans la tracklist John Vanderslice, Mark Kozelek, Hospital Ships, Lucas Oswald, Jonathan Meiburg, Damien Jurado, Dreamend, Brown Bird, Haunt the House, TW Walsh, Phil Elverum, Alasdair Roberts, Scout Niblett, Jeffrey Lewis, Will Johnson, The Wave Pictures, Allo Darlin, Darren Hayman, Will Oldham et Herman Dune.

L'album sera accompagné d'une reproduction d'une oeuvre de Will Schaff, initialement destinée au songwriter. Il raconte: 

Back in January of this year, I received a message from a friend of Jason's, Tara Samaha. Like so many of us were, she was concerned. She was concerned for his safety, mental and physical health after receiving an alarming email. She felt he needed a map to help him through these troubled times and then asked that I make him one. I did. Sadly we were never able to land a concrete address for Jason, where we knew he would get the map. I know that he had lost things important to him over the past few years, for various reasons, so I wanted to be sure this got into his hands, and no one else. That said - sadly - the map was never delivered to him.


dimanche 24 mars 2013

Quelque part dans le Vercors

Toujours finir par une descente de "Choucas", pour une vue sur le Vercors sous une très belle lumière de fin de journée. 

Un peu plus loin (et plus bas) (et plus tard)...

vendredi 22 mars 2013

Album Cover of the Week

Très belle pose de Francis Fruit et Yugo Solo sur le nouvel EP de Câlin, intitulé "Menaces et Opportunités" (de la célèbre matrice SWOT), le tout avec un son surprenant, puisque carrément électro-techno.

A télécharger librement (ou en donnant un peu de sous) sur le site de l'Amicale Underground :

Câlin, Menaces et Opportunités (Amicale Underground, 2013)


mercredi 20 mars 2013

De la communication instantanée par idées reçues

Cette fois, ca y est, j'ai rangé mon Bourdieu dans la bibliothèque. Un dernier extrait, donc, sur lequel je reviens juste après.

Je disais en commençant que la télévision n’est pas très favorable à l’expression de la pensée. J’établissais un lien, négatif, entre l’urgence et la pensée. [...] Un des problèmes majeurs que pose la télévision, c’est la question des rapports entre la pensée et la vitesse. Est-ce qu'on peut penser dans la vitesse ? Est-ce que la télévision, en donnant la parole à des penseurs qui sont censés penser à vitesse accélérée, ne se condamne pas à n’avoir jamais que des fast-thinkers, des penseurs qui pensent plus vite que leur ombre...
Il faut en effet se demander pourquoi ils sont capables de répondre à ces conditions tout à fait particulières, pourquoi ils arrivent à penser dans des conditions où personne ne pense plus. La réponse est, me semble-t-il, qu'ils pensent par "idées reçues". Les "idées reçues" dont parle Flaubert, ce sont des idées reçues par tout le monde, banales, convenues, communes ; mais ce sont aussi des idées qui, quand vous les recevez, sont déjà reçues, en sorte que le problème de la réception ne se pose pas. Or, qu'il s’agisse d’un discours, d’un livre ou d’un message télévisuel, le problème majeur de la communication est de savoir si les conditions de réception sont remplies ; est-ce que celui qui écoute a le code pour décoder ce que je suis en train de dire ? Quand vous émettez une "idée reçue", c’est comme si c’était fait; le problème est résolu. La communication est instantanée, parce que, en un sens, elle n’est pas. Ou elle n’est qu'apparente. L’échange de lieux communs est une communication sans autre contenu que le fait même de la communication. Les "lieux communs" qui jouent un rôle énorme dans la conversation quotidienne ont cette vertu que tout le monde peut les recevoir et les recevoir instantanément : par leur banalité, ils sont communs à l’émetteur et au récepteur. A l’opposé, la pensée est, par définition, subversive : elle doit commencer par démonter les "idées reçues" et elle doit ensuite démontrer. [...] Ce déploiement de la pensée pensante est intrinsèquement lié au temps.

Pierre Bourdieu, Sur la télévision (1996)


Dans l'esprit de Bourdieu, ce texte s'applique aux commentateurs / spécialistes régulièrement consultés sur des sujets bien déterminés. Je l'étendrais bien à la parole politique, notamment dans le cadre d'interviews ou débats, à l'issue desquels il m'est souvent arriver de relever ce qui est ici désigné par
"une communication sans autre contenu que le fait même de la communication".
Peut-être que la seule information, dans beaucoup d'interviews, est de savoir si tel(le) responsable reprend ou se démarque de la ligne de son parti.

S'il/elle la reprend, alors véritablement, la gain d'information est nul, tant il serait possible à l'avance de formuler la réponse à la question du journaliste (réponse d'ailleurs connue à l'avance par celui-ci, puisque la même question aura été posée sur d'autres plateaux TV/radios auparavant [*]), ou, en cas de débat contradictoire, d'anticiper les arguments des uns et des autres.


Je prends l'exemple - à mon sens symptomatique - de la TVA Sociale, qui faisait débat en février 2011 [**]Le schéma ci-dessous (signé Alternatives Economiques) illustre bien que la problématique. 

Dès lors, les discours politiques de droite et de gauche sont connus à l'avance, puisque l'argumentation du premier aboutira à la hausse de la compétitivité des entreprises française, tandis que le second objectera les effets néfastes sur le pouvoir d'achat.

Bien entendu, chaque camp connaît les positions / objections de son contradicteur. Tout le monde est donc en pilote automatique, pour un résultat nul puisque de toute façon, rien ne permet de trancher.

Comme en marketing, la communication politique renseigne moins par son contenu que par l'intention de positionnement qui la motive.



[*] Je ne suis en revanche pas de ceux (canal+ en tête) qui pouffent en entendant une même personne reprendre les exacts mêmes mots d'une émission à l'autre : il ne me paraît pas illogique qu'à question identique, réponse identique. 

[**] puis à nouveau à l'automne 2012, cette fois, à l'initiative du gouvernement socialiste

mardi 19 mars 2013

Hold on, Magnolia

Hold on, Magnolia, to that great highway moon
No one has to be that strong
But if you’re stubborn like me
I know what you’re trying to be

Hold on, Magnolia, I hear that station bell ring
You might be holding the last light I see
Before the dark finally gets a hold of me

Hold on, Magnolia, I know what a true friend you’ve been
In my life I have had my doubts
But tonight I think I’ve worked it out with all of them

Hold on, Magnolia, to the thunder and the rain
To the lightning that has just signed my name to the bottom line
Hold on, Magnolia, I hear that lonesome whistle whine
Hold on, Magnolia, I think its almost time



Aujourd'hui, j'ai reçu quatre mails perso et un texto porteurs de la triste nouvelle du décès de Jason Molina, à l'âge de 40 ans. Jason Molina était depuis 1996 l'homme derrière Songs: Ohia. J'ai découvert sa musique folk-rock sur une borne d'écoute à la FNAC de Grenoble en 2000 pour la sortie de l'album "the Lioness" (distribué en France par Poplane... je dis ça pour les gens du métier).
L'année qui suivit, durant mon exil teuton et grâce à la fabuleuse plateforme d'écoute libre qu'était Epitonic, j'ai pu me familiariser avec ses albums précédents (notamment "Axxess and Ace"), et me réjouir de la sortie de "Ghost Tropic" en 2001 (deuxième meilleur album des 00's à mon sens). De retour en France, ça n'est qu'en 2003 que s'est présentée pour moi l'occasion de voir le groupe en concert (un 13 avril à Mains d'Oeuvre). Un poil trop tard, puisque déjà le virage Magnolia Electric Co. s'amorçait. Depuis, j'ai revu Jason Molina en solo dans cette même salle quatre années plus tard (avec Stanley Brinks en première partie), avant un ultime concert au Café de la Danse en 2009 (précédé d'une rencontre / session dans les locaux voisins de Radio Campus Paris).

Je publierai un peu plus tard dans la semaine d'autres paroles de Songs: Ohia, accompagnées d'extraits sonores. Si vous ignorez tout de son oeuvre, et souhaitez la découvrir immédiatement, un bon départ est la chanson Tigress.

Songs: Ohia, Hold on Magnolia
Magnolia Electric Co. (Secretly Canadian, 2003)

dimanche 17 mars 2013

Wonderful, Glorious [Top Tape]


Le prochain volume de Top Tape sera très pop, il y aura des albums de Wave Machines à gagner, et il se déroulera Dimanche prochain (le 24 mars) sur Radio Campus Paris !

D'ici là, vous pouvez (ré)écouter le Volume 6 de la Saison 5, et peut-être même gagner des albums et 45t de Arch Woodman. Furent également conviés : the Sea and Cake, Radar Brothers, Hayden, Royal City, Bonnie ‘Prince’ Billy, Widowspeak, Giles Corey, Matmos, Serengeti, Apparat, Eels, PVT et Pilöt Kidz.

[Ecoute rapide: .]

mardi 5 mars 2013

When I was a kid



La vidéo du Dimanche... (publiée un lundi à minuit, mais tout va bien).

Cette vidéo, donc, illustre un poème d'un certain Shane Koyczan. Elle se compose d'une succession de séquences animées, chacune signée d'un contributeur différent.

J'ai choisi d'en extraire une poignée captures d'écran, qui suivront la courte intro ci-dessous. En toute fin d'article, l'animation en elle-même, oeuvre assez forte comme vous pourrez en juger.

My experiences with violence in schools still echo throughout my life but standing to face the problem has helped me in immeasurable ways.

I wrote “To This Day”, a spoken word poem, to further explore the profound and lasting impact that bullying can have on an individual.

Schools and families are in desperate need of proper tools to confront this problem. We can give them a starting point… A message that will have a far reaching and long lasting effect in confronting bullying.



Shane Koyczan, To This Day (2012)


(ou sur youtube)

samedi 2 mars 2013

Day at a time, I suppose

Mon rapport au temps et aux "séries TV" induit que je visionne, avec beaucoup de retard, celles que la postérité désigne comme must-(have-)see(n). Assez peu, donc.

The Wire est l'une d'elle. Effectivement, je ne suis pas déçu... voire même carrément épaté par l'écriture. C'est avant tout le grand nombre de personnages, l'extrême justesse et la cohérence de chacun qui impressionnent...

Si les dialogues sont savoureux (notamment pour l'accent des protagonistes), ils se prêtent en revanche mal à être cités sur ce blog.

Court extrait, donc, qui ne parlera sans doute qu'à ceux qui connaissent la série.
"Omar" (best character of all time, selon Obama) y est interrogé par le procureur de la république en tant que témoin.


- State calls Omar Little, your honor. [...] Do you solemnly swear to tell the truth, the whole truth and nothing but the truth, so help you God?
- I surely do.
- State your name for the record.
- Omar Devon Little.
- Mr. Little, how old are you?
- About 29, thereabout.
- And where you live?
- No place in particular, ma'am.
- You're homeless?
- In the wind, so to speak.
- And what is your occupation?
- Occupation?
- What exactly do you do for a living, Mr. Little?
- I rip and run.
- You... (?!)
- I robs drug dealers.
- And exactly how long has this been your occupation, Mr. Little?
- I don't know, exactly. I venture to say maybe about eight or nine years.
- Mr. Little, how does a man rob drug dealers for eight or nine years and live to tell about it?
- Day at a time, I suppose.


the Wire, David Simon (S02)

vendredi 1 mars 2013