jeudi 26 septembre 2013

A whole load of averageness

I'm OK-looking ; [...] I'm average height, not slim, not fat, no unsightly facial hair. I keep myself clean, wear jeans and T-shirts and a leather jacket more or less all the time apart from in the summer, when I leave the leather jacket at home. I vote Labour. I have a pile of classic comedy videos — Monty Python, Fawlty Towers, Cheers, and so on. I can see what feminists are on about, most of the time, but not the radical ones.

My genius, if I can call it that, is to combine a whole load of averageness into one compact frame. I'd say that there were millions like me, but there aren't, really: lots of blokes have impeccable music taste but don't read, lots of blokes read but are really fat, lots of blokes are sympathetic to feminism but have stupid beards, lots of blokes have a Woody Allen sense of humor but look like Woody Allen. Lots of blokes drink too much, lots of blokes behave stupidly when they drive cars, lots of blokes get into fights, or show off about money, or take drugs. I don't do any of these things, really; if I do OK with women, it's not because of the virtues I have, but because of the shadows I don't have.

Nick Hornby, High Fidelity (1995)

Je n'avais jamais lu "High Fidelity". C'est chose faite, depuis le printemps dernier. Et ce sera le prochain livre que je couvrirai sur ce blog.

dimanche 22 septembre 2013

Quand la terre tremble sous nos pas


La nausée est un malaise noble, ce n'est pas le nom qui convient à cette poussière, cette honte qui reste dans ma gorge, que je ne peux pas digérer, que je ne peux pas recracher non plus… Quand quelqu'un nous quitte et qu'on souffre, on ne sait jamais très bien pourquoi. Il n’y a pas que l’amour, il y a l’orgueil, l’amour propre, j’en avais pris mon parti… J’essayais de ne plus souffrir ou de souffrir le moins longtemps possible, sachant qu’un jour je ne souffrirai plus. Mais quand la terre tremble sous nos pas, quand l’amour, la réussite, la révolution ne veulent plus rien dire…
...Vous savez, le monde sera sauvé par les enfants, les soldats et les fous.

Jean Eustache, La maman et la putain (1973)


Ce sera le dernier dialogue extrait de "La maman et la putain" dans ces colonnes... on se quitte donc avec un Alexandre (JP Léaud) visiblement ému.

samedi 21 septembre 2013

Album Covers of the Week

Ménage de pré-rentrée à Radio Campus Paris : je passais récemment en revue la discothèque et y redécouvrai ces jolies pochettes colorées :

Bocage, Bon chemin + remixed (Sosei, 2008)
(photo : Philippe Bernard)

Apes did ensemble, s/t (rabeat's cage, 2010)
(avec le nom du groupe intégré au visuel, si vous regardez bien)
(Album art: Frederic Tacer)


Jennifer Gentle, the Midnight Room (Sub Pop, 2007)

the Horror the Horror, wired boy child (tapete, 2008)

mercredi 18 septembre 2013

What is an object? What is a thing?

What is an object?
What is a thing?
Something that I sweat for.
A thing I think and think
about
A sound that reflects an
object, an object that
reflects itself, a repetition
A reflection
Paper, ink, petroleum,
REPEAT.

What is production?
Mass produced, massively
productive, products on
a massive scale.
My hands.
A symbol.
defeat
or
triumph.
DEFECTIVE.
Handmade space.
A home erected for an object.

A record needs a home, a
sound needs a place to go.
Something that I've touched,
an object that you touch,
HEAR.
An objection,
A question I raise,
an institution (label) has
no function anymore.
A sound still needs a home.
An object needs space.
An object serves its purpose,
The sound remains,
objective space.

- B. Torst, n.d.

Ce texte figure à l'intérieur du chouette packaging du nouvel album de No AgeAn object
(Sub Pop, 2013).


*
*      *

A propos du packaging, le groupe s'exprimait récemment en ces termes, interviewé par Pitchfork

Pitchfork: You decided to take this record into your own hands by manufacturing as much of every CD and LP as possible. How did that happen?

DS: I don’t sit around and play music on guitar or drums around my house. To me, music is a medium that I chose-- or chose me, maybe-- to express myself. After "Everything in Between", we were trying to write, and it was going nowhere. I started thinking about how to make a record and why I wasn’t able to make a record and why I wanted to make a record. It was a starting point for me.

RR: I said, “You’re crazy. I don’t want to fold a bunch of fucking records.”

DS: We kept talking about it, and eventually, Randy said, “Hell yeah, let’s do it.” We started writing music a little bit and recording it, and it went a lot faster after that.

Pitchfork: What did Sub Pop say?

RR: “You’re crazy!”

DS: Just like every record we’ve done, at first, they say, “Why do you guys want to make it so difficult?” The original idea was to make an unlimited edition, and we would continue to produce them until the end of time. But that would mean that if we were on tour, or something happened, we wouldn’t be able to produce the record, and it wouldn’t be in stores. But Sub Pop is in the business of selling records, so they’re not really into conceptual ideas of how to fuck with records as an object. So we decided to do a limited edition of 5,000 LPs and 5,000 CDs, which, in any sense, is not that limited. I wanted the number to be absurd, because the point was to see if we were able to do this thing. And we did it.
We physically made everything, cut everything, printed everything, boxed everything and shipped it to the printing plant. We couldn’t press the record ourselves because there is a lot of legal liability, and we’d have to get a job at the pressing plant, basically. We would if we had time, but we weren’t able to. We physically touched them all and stamped them and wrote on them and sweated on them.

mardi 17 septembre 2013

La musique, cet exercice métaphysique inconscient

Schopenhauer aura accompagné ce blog tout au long de l'été, via son ouvrage "Le monde comme volonté et représentation". Il me reste encore tout un "Livre" à évoquer, mais je vous proposerai, après cet article, de marquer une pause avant d'y revenir.

Schopenhauer est un de ces philosophes qui a bâti un "système philosophique", complet et cohérent. Il pousse d'ailleurs la logique à son extrême puisque le moindre concept y est défini (matière, force, rire, joie, erreur, mensonge...), de telle sorte que partant de rien, on a un peu l'impression de recomposer page après page le monde qui nous entoure.

Le livre III traite de l'Art (l'Idée platonicienne : l'objet de l'art). Tous les arts y sont abordés un à un, de l'architecture à la tragédie, en passant par la peinture (dont il était d'ailleurs question dans un précédent article). Schopenhauer aborde la musique en dernier.

[...] Nous devons alors constater que, néanmoins, l'un des beaux-arts était exclu de nos considérations, et devait le rester, car dans l'enchaînement systématique de notre présentation, aucune place ne lui était appropriée: il s'agit de la MUSIQUE. Elle se tient tout à fait à part de tous les autres arts. Nous ne reconnaissons pas en elle la reproduction, la répétition d'une quelconque Idée des êtres dans le monde et pourtant elle est un art si important et absolument magnifique, elle agit avec une telle puissance sur le plus intime de l'homme, elle est comprise si parfaitement et si profondément par lui, comme un langage tout à fait universel dont l'évidence surpasse celle du monde perceptible lui-même, au point que nous devons certainement chercher bien davantage en elle qu’un exercitium arithmeticae occultum nescientis se numerare animi [exercice d'arithmétique inconscient où l'esprit ne sait pas qu'il compte], comme la qualifiait Leibniz (*), et ce tout à fait à juste titre, dans la mesure où il ne considérait que sa signification immédiate et externe, son écorce. [...] À notre point de vue, fixé sur l'effet esthétique, nous devons lui accorder une signification beaucoup plus sérieuse et profonde, qui renvoie à l'essence la plus intime du monde et à notre soi ; [...] D'une manière ou d'une autre, la musique doit se rapporter au monde comme la représentation se rapporte au représenté, la copie au modèle ; c'est ce que nous pouvons déduire, par analogie, des autres arts, qui possèdent tous ce trait caractéristique, et dont l'effet sur nous est, dans l'ensemble, de la même espèce que l'effet exercé par la musique, sauf que celui-ci est plus fort, plus rapide, plus nécessaire, plus infaillible. [...]

[La musique] n'énonce jamais le phénomène, mais toujours seulement l'essence intime, l'en-soi de tout phénomène, la volonté elle-même. Elle n'exprime donc pas telle ou telle joie singulière et déterminée, telle ou telle affliction, ou douleur, ou terreur, ou jubilation, ou gaieté ou sérénité, mais LA joie, l'affliction, LA douleur, LA terreur, LA jubilation, LA gaieté, LA sérénité elles-mêmes, pour ainsi dire in abstracto, c'est-à-dire ce qu'elles ont d'essentiel sans aucun ajout, donc sans non plus leurs motifs. Nous les comprenons pourtant parfaitement dans cette quintessence abstraite même. C'est la raison pour laquelle notre imagination s'en trouve si aisément stimulée, en essayant alors de forger ce monde d'esprits qui nous parle aussi directement, ce monde invisible et pourtant si vif et animé, de lui conférer chair et os, bref de l'incarner dans un exemple analogue.

Arthur Schopenhauer, Le Monde comme Volonté et Représentation
(1819)

- - - - -
Il faut préciser ici que Schopenhauer parle de musique "instrumentale", et devient plus nuancé (sur l'universalité de la musique) lorsqu'elle est accompagnée d'un chant intelligible.

(*) La notion d'arithmétique se rapporte à l'ensemble des principes harmoniques [occidentaux serait-on tenter d'ajouter]. Reprenant cette citation de Leibniz, Schopenhauer écrira un peu plus loin dans le même chapitre :
"La musique est un exercice de métaphysique inconscient où l’esprit ne sait pas qu’il philosophe"

Pour celles et ceux que ça intéresse : Le texte intégral de ce chapitre (qui aborde même des notions de théorie et d'harmonie) est accessible en ligne ici (dans une autre traduction)

mardi 10 septembre 2013

Flesh and Bones / [Crossed Covers]

Ca fait un moment que j'attends une occasion pour publier des oeuvres du peintre William Bouguereau. Bon, évidemment, dans le domaine des arts picturaux, c'est un peu honteux d'aimer ce peintre (puisqu'à rebours de la modernité des impressionnistes), mais j'assume !

L'occasion m'est donc offerte par Holograms (déjà album cover of the week pour leur premier album).

Voici les pochettes de l'album For Ever, et du single Flesh and Bones :


On y reconnait Dante et Virgil d'une part,
Adam, Eve et Abel (assassiné par Caïn) d'autre part :

Attendons le second single, pour voir si le groupe prolongera cette thématique. En attendant, cet article me permet de (re?)publier ce très beau visuel de Team Ghost, reprenant lui aussi un tableau de Bouguereau.



D'autres exemples (histoire d'être complet), demain.


Holograms, For Ever (Captured Tracks, 2013)
Holograms, Flesh and Bones (Captured Tracks, 2013)
Team Ghost, Celebrate what you can't see (Sonic Cathedral, 2010)
William Bouguereau, Dante et Virgile (1850)
William Bouguereau, Premier Deuil (1888)
William Bouguereau, La Nymphée (1878)

Edit : Pas de deuxième partie à cet article, finalement, j'ajoute les références restantes (anecdotiques) ci-après


William BouguereauL'Amour et Psyché, enfants (1890)
William BouguereauLa vierge consolatrice (1877)

Ludwig von 88, Ragnarok côté musique...

lundi 2 septembre 2013

Qu'avez-vous pensé?



- Vous accostez souvent les filles comme vous m'avez accostée?
- Je vous ai dit : je n'accoste jamais. Mais avec vous, je n'avais pas le choix : Comment aurai-je pu vous retrouver?
- Vous vous souvenez de ce que vous m'avez dit? "Je n'ai pas le temps de boire un verre avec vous, avez-vous un numéro de téléphone?"
- Je me souviens très bien. Si ce n'est pas indiscret, qu'avez-vous pensé?
- J'ai été très surprise de vous retrouver marchant à côté de moi. Et je vous ai trouvé moins beau que je ne pensais... Je ne croyais pas que vous m'appelleriez. Je vous ai menti ; j'étais libre, j'ai fait exprès de ne pas venir au rendez-vous.
- C'est ce que je pensais.
- Et je ne comprenais pas pourquoi vous ne vouliez pas coucher avec moi. Je me disais : il est peut-être malade, impuissant... Et je me suis aperçu que vous ne l'étiez pas.
- Ca vous a ennuyé que je ne cherche pas à coucher avec vous?
- Comment voulez-vous qu'une fille sur qui les types sautent au bout de cinq minutes ne soit pas troublée quand quelqu'un est gentil, ne cherche pas à la baiser?

Jean Eustache, La maman et la putain (1973)