lundi 23 mai 2022

You must live

Gros revival Minus Story en ce moment sur ma platine. Il faut dire que les albums figurent en première position de mon étagère préférée. Dès que me prend l'envie de ré-écouter de "l'ancien", c'est souvent sur ce groupe du Kansas que ça tombe ! Et j'aime toujours autant ce qu'on pourrait comparer peut-être à du mercury rev lofi (et humble). Après tout, ne définissaient ils pas leur son comme le "wall of crap" ?

Minus Story me renvoie également à une époque où le label Jagjaguwar offrait une belle cohérence.

J'aurais voulu commencer par publier des paroles de "The Captain Is Dead, Let the Drum Corpse Dance", mais elles sont malheureusement introuvables sur internet. Je ne désespère pas que le chanteur Jordan Geiger me les adresse (à supposer que son adresse e-mail n'ait pas changé, après toutes ces années). A suivre.

En attendant, "ringing in the dark" :

Dead now, you must lift your voice to air,
You're suffering and you're in paradise
You'll block out the lights and then lay down
And now, on the floor, in the fields.
And out to the streets, lay your bit down
You must live, you must live
But out you will go
And now, into the night, ring your voice out
"You must live, you must live" and out it will go
If all we are is instruments
They blocked your sound when they bit in
And all we arc ise innoncents, we're ringing in the dark again
Now, on the floor, your toots down
Up to the bla(k housie on the hill
Knife in hand, noose in air, to ruin, to sow
And now, you must live, but not tonight, you're in paradise
Anti you'll black out the lights and run to the cliffs

Minus Story, ringing in the dark
No Rest For Ghosts (Jagjaguwar, 2005)

mercredi 18 mai 2022

Ecarlate

La force et la pertinence de la servante écarlate ("the handmaid's tale") se vérifie chaque jour, tant cette dystopie se révèle plausible. Dans le livre, une baisse drastique de la fécondité occasionne la prise de pouvoir d'une communauté, qui établit un régime totalitaire, contrôlant entièrement la vie des femmes, pour n'en dédier certaines qu'à la simple fonction reproductive (et d'autres aux tâches ménagères, à l'enseignement, ou au rôle d'épouse).

En faisant un effort de "projection", quels systèmes de pensées pourraient aujourd'hui s'accommoder d'une telle conception de la femme ? Les partis revendiquant une "politique nataliste" (et nationaliste, hum...) d'une part. Et les fondamentalistes religieux d'autre part.

Ceci étant posé, rapide aperçu de l'ambiance actuelle aux Etats-Unis, depuis qu’a fuité le projet de décision de la Cour suprême remettant en cause le droit constitutionnel à l’avortement, via cet article de LeMonde :
 
Les experts de la surveillance numérique recommandent aux femmes qui résident dans des Etats anti-avortements de supprimer les applications de suivi du cycle menstruel. Et si elles visitent une antenne du Planning familial, de ne surtout pas emporter leur portable. Certaines militantes sont alarmistes. « Dans des Etats comme le Texas, la situation va être plus effrayante que vous ne l’imaginez, écrit l’essayiste Lauren Hough, qui vit à Austin (Texas). Ne discutez pas de vos plans sur les réseaux sociaux. Effacez vos applications de suivi menstruel. Ne mettez rien par écrit. » Et si vous ratez une menstruation, préconise une autre commentatrice, « n’en parlez à personne ».

Aux Etats-Unis, suspicion sur les applis de suivi des règles, Corine Lesnes

mardi 17 mai 2022

Demain ça ira mieux

Ce sera là l'ultime extrait d'A la ligne. Je n'ai pas pour habitude de publier des chapitres entiers, mais il faut avouer que celui-ci dit tout... et illustre dans le même temps la force ce livre.
 

Mon chien Pok Pok 

Si tu savais en rentrant chaque jour
Comme ça me coûte d'aller te promener 

Je suis au bord de l'épuisement
Même pas au bord d'ailleurs
Complètement épuisé
Ravagé de fatigue
Prêt à m'endormir sur place à peine mon retour 

Mais en rentrant à chaque fois
La joie et même plus que la joie de te savoir derrière la porte
Vivant
À frétiller de la queue et du popotin
À faire cette fête des retrouvailles 

Tu dois aimer cette odeur d'abattoir que je transpire
Mes mains que tu lèches comme des bonbons
Mes habits que tu renifles 

A peine le temps de me poser
Faire descendre la pression 

Boire une bière
Il faut aller se balader
Même si je n'en peux plus
Même si parfois je pleure littéralement de fatigue

Mais tu n'y es pour rien
Jeune chiot de six mois
Dans ces histoires de tueries d'humains
Tu veux juste courir
Jouer
Agripper l'océan sur la plage où nous avons coutume d'aller
Rameuter les oiseaux
Creuser le sable encore et encore
Ramener des bouts de bois des algues et encore courir et jouer 

Tu es vivant mon Pok Pok
Et moi accablé de fatigue
Mais si heureux de te voir vivant et heureux
Ça me change des animaux morts sur lesquels je bosse à longueur de journée

Je ne te parle pas trop de mes journées
Je préfère te raconter que je suis fatigué mais joyeux de bosser
De te retrouver
Et que viens
On va en balade
On est à la plage

Que si je bosse c'est parce qu'il faut bien pouvoir te payer des croquettes 
Des histoires d'humains 

Qu'y comprendrais-tu si je te racontais exactement l'abattoir 
Ton regard changerait-il sur moi 
Me considérerais-tu comme un agent de la banalité du mal 
Un salaud ordinaire 
Celui qui accomplit sa tâche de maillon de la chaîne dégueulasse et s'en dédouane pour plein de bonnes raisons 

C'est peut-être atroce à dire mais 
Les chefs me demanderaient de tuer les bêtes 
Que je le ferais Il faut bien bosser 
J'entends parfois à la pause les gars qui sont à la tuerie 
Leur serre la main 
Discute un peu 
Ils n'ont l'air ni pires ni meilleurs que moi 
Ont les yeux aussi lointains et fatigués 
Non ceux de barbares sanguinaires 
Peut-être Sans doute 
Certains ont-ils aussi un chien qu'ils chérissent 
Je ne sais pas 

L'usine bouleverse mon corps 
Mes certitudes 
Ce que je croyais savoir du travail et du repos 
De la fatigue 
De la joie 
De l'humanité 

Comment peut-on être aussi joyeux de fatigue et de métier inhumain 
Je l'ignore encore 
Je croyais n'y aller 
Que pour pouvoir te payer tes croquettes 
Le véto à l'occase 
Pas pour cette fatigue ni cette joie 

Allez Pok Pok 
Encore quelques minutes de balade 
Je suis fatigué 
Je n'en peux plus 
Demain Il faut aller bosser 
Et quand je rentrerai 
Demain 
On ira faire une balade plus longue j'espère 
Là je n'en peux plus 

Demain ça ira mieux 
Juste me reposer d'ici là 
Bien dormir 
Demain mon Pok Pok je te jure 
Si tu savais 
Demain

Joseph Ponthus, À la ligne (2019)

dimanche 15 mai 2022

It's sad but it's true

 Je n'avais jusqu'alors jamais réussi à regarder un film de Leos Carax en entier, le bouche-à-oreille et l'affiche d'Annette (Adam Driver + the Sparks) auront suffi à rompre la malédiction... tout en confirmant que je n'ai décidément pas d'atomes crochus avec ce réalisateur (surtout s'il décide de teinter son film d'un vert moche). Bien sûr, la destinée de Henry McHenry, Ann et Annette touche, avec pour point d'orgue cette dernière scène/chanson, et la dureté de ses paroles.
 
[Henry:]
I'll sing these words to you
I hope they will ring true
They're not some magic chimes
To cover up my crimes
Annette, of this I'm sure
Imagination's strong
And reason's song
Is weak and thin
We don't have long

I stood upon a cliff
A deep abyss below
Compelled to look, I tried
To fight it off, God knows I tried
This horrid urge to look below
But half-horrified
And half-relieved
I cast my eyes
Toward the abyss, the dark abyss
I heard a ringing in my ears
I knew my death knell's ugly sound
The overbearing urge to gaze
Into the deep abyss, the haze
So strong the yearning for the fall
Imagination's strong
And reason's song
Is weak and thin
We don't have long

[Annette:]
I'll never sing again!
Shunning all lights at night
I'll never sing again!
Smashing every lamp I see
I'll never sing again!
Living in full darkness
I'll never sing again!
A vampire forever!

Annette! No! No, no!
Annette, Annette, no

I sang these words to you
Can I forgive what you have done?
I hope that they'd ring true
And will I ever forgive Mom?

Imagination is so strong
Her deadly poison I became
And reason's song is never strong
Merely a child to exploit!

Imagination is so strong
Forgive you both?
And reason's song
Forget you both?
So faint and shrill
To take that oath?
I stood above the deep abyss
To take that oath?


Why should I now forgive?
Why should I now forget?
I can never forgive!
I can never forget!
Both of you were using me for your own ends
For your own ends
Not an ounce of shame
The two of you, you're both to blame
I wish that both of you were gone
Wish you were gone!
No don't blame Ann!
Wish you were gone!
Annette that's wrong
Wish you were gone!
No don't blame Ann!
Both of you gone!


But is forgiveness the sole way
This horrid urge to look below
When all has gone so far astray
God knows I tried, to fight it off
To extract the poison from one's heart
Half-horrified, and half-relieved
And from one's soul, I can't be sure
I cast my eyes down the abyss

Forgive the two of you or not?
I take this oath
Sympathy for the dark abyss
Forgive you both?
I take this oath
Sympathy for the dark abyss
I take this oath
Forgive you both?
Or forget you both?
Don't cast your eyes down the abyss
Annette please don't
I must be strong
I must be strong!

Now, you have nothing to love
Why can't I love you?
Can't I love you?
Now, you have nothing to love
Can't I love you, Annette?
No, not really, Daddy, it's sad but it's true
Now you have nothing to love

Annette, my Annette...
Never cast your eyes down the abyss

Goodbye, Annette
Goodbye, Annette
Goodbye, Annette
Goodbye, Annette
Goodbye

Leos Carax, Annette (2021)
Sparks, Sympathy for the Abyss (2021)