Je me souviens de l'Egypte et de la Grèce en 6ème. De la révolution française en 4ème et à nouveau en 1ère. De la crise de 1929 en troisième. Du moyen-âge en primaire, truffé d'anecdotes et de "personnages".
Je ne me souviens pas si ces cours d'histoire ont jamais dépassé la succession de faits et dates à retenir (articulés entre eux, certes)...
Aucun souvenir d'avoir d'une quelconque manière appréhendé les aspects profondément politiques d'une situation ou d'une période, ni leurs conséquence sur notre présent.
Disons que si l'éducation donne à chacun les jalons la connaissance historique, afin de pouvoir éventuellement y revenir plus tard, c'est déjà pas si mal.
En plus des aspects que j'évoquais dans mes deux précedents articles à ce sujet, la lecture de la biographie de Marie Sutart m'a donc intéressé à bien des égards, puisque sortant du cadre franco-français. On y lit en toile de fond la réforme protestante, on y appréhende les relations "internationales" entre nations, on y croise des souverains qui au-delà de leur existence ont le sens de l'Histoire et le souci de la Postérité, on y pressent l'incroyable gravité du geste qui clôture ce livre.
Maintenant il n'y a plus de choix qu'entre la grâce et la mort. La décision toujours ajournée et qu'on ne peut plus écarter se fait pressante. Elisabeth frémit, elle devine les conséquences immenses, d'une portée incalculable qu'aura son attitude. Il est difficile de se représenter aujourd'hui ce qu'il y avait de nouveau et de révolutionnaire dans la mesure prise contre Marie Sutart et qui ébranla toute la hiérarchie du monde. Car que signifie en somme l'envoi d'une reine à l'échafaud si ce n'est montrer à tous les peuples asservis de l'Europe que les monarques sont eux aussi responsables de leurs actes devant la justice et nullement intanglibles? Ce n'est pas la mort d'un être humain, c'est une idée qui arrête Elisabeth. Ce précédent d'une tête courronnée qui tombe sur le billot aura ses répercussions pendant des siècles, ce sera une menace permanente pour tous les rois de la terre. Sans cet exemple il n'y eût pas eu d'exécution de Charles Ier, ni ensuite de Louis XVI et de Marie-Antoinette.
Paul Delaroche, La dernière communion de Marie Stuart (1858)