J'ai reproduit de nombreux textes ici abordant la Musique de manière générale (qu'ils proviennent de Kundera, Nietzsche, Kandinsky ou même des scientifiques), mais l'Ecriture encore jamais.
On besoin d'être admiré, aimé, terriblement besoin, c'est suffisamment laborieux et éprouvant d'écrire un livre pour qu'espère obtenir cette récompense qu'est l'admiration et qui touche un nerf beaucoup plus fondamental que la satisfaction narcissique: l'admiration pour un auteur, ça veut dire - oui, tu as le droit d'exister, toi qui en doutais, toi, qui pensais n'avoir rien à faire là, tu as le droit de cité. C'est une autorisation à exister. Mais voilà : au moment où l'admiration t'accorde le droit de cité, elle te sépare du lecteur. Ce qui est arrivé, c'est entre le livre et le lecteur. Toi, tu deviens une sorte d'intrus, quelqu'un qui a usurpé l'identité du livre et qui se présente sous son nom. Tu es assez étranger à ça. Alors après, tout peut arriver, de vraies rencontres, ou même furtives, mais il n'y a rien de plus étrange qu'une conversation, une rencontre, une liaison, une histoire d'amour avec quelqu'un dont tu ne sais rien et qui a cette avance sur toi : celle d'avoir lu tes livres et celle de l'admiration. L'admiration est la plus belle chose que puisse recevoir un auteur mais elle fausse d'entrée de jeu le pied d'égalité sur lequel n'importe quelle rencontre a besoin de s'appuyer.
Arnaud Cathrine, Les histoires de frères (2005)
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