mercredi 30 décembre 2020
Pourquoi encourager les petits garçons à faire du bruit et les filles à se taire ?
lundi 28 décembre 2020
Erratics and unconformities / 2020 Best Album Covers (Part.3)
vendredi 25 décembre 2020
Evermore / 2020 Best Album Covers (Part.2)
mercredi 23 décembre 2020
Sign / 2020 Best Album Covers (Part.1)
mardi 15 décembre 2020
Le contrat marital
Je concluais un précédent article dédié à King Kong Théorie (2006), en citant Silvia Federici (2019), expliquant la nécessité d'opposer prostituées et femmes au foyer, afin de ne surtout pas remettre en cause le statut de ces dernières. Laissons Virginie Despentes formuler ceci autrement :
Il faut dire que la prostitution est un sujet qui divise (tout autant que le voile), selon qu'on y voit une attente à la dignité (resp. marque de soumission) ou qu'on se refuse de dicter aux femmes leur conduite.
Faire ce qui ne se fait pas : demander de l'argent pour ce qui doit rester gratuit. La décision n'appartient pas à la femme adulte, le collectif impose ses lois. Les prostituées forment l'unique prolétariat dont la condition émeut autant la bourgeoisie. Au point que souvent des femmes qui n'ont jamais manqué de rien sont convaincues de cette évidence : ça ne doit pas être légalisé. Les types de travaux que les femmes non nanties exercent, les salaires misérables pour lesquels elles vendent leur temps n'intéressent personne. C'est leur lot de femmes nées pauvres, on s'y habitue sans problème. Dormir dehors à quarante ans n'est interdit par aucune législation. La clochardisation est une dégradation tolérable. Le travail en est une autre. Alors que, vendre du sexe, ça concerne tout le monde et les femmes « respectables » ont leur mot à dire. Depuis dix ans, ça m'est souvent arrivé d'être dans un beau salon, en compagnie de dames qui ont toujours été entretenues via le contrat marital, souvent des femmes divorcées qui avaient obtenu des pensions dignes de ce nom, et qui sans l'ombre d'un doute m'expliquent, à moi, que la prostitution est en soi une chose mauvaise pour les femmes. Elles savent intuitivement, que ce travail-là est plus dégradant qu'un autre. Intrinsèquement. Non pas : pratiqué dans des circonstances bien particulières, mais : en soi. L'affirmation est catégorique, rarement assortie de nuances, telles que « si les filles ne sont pas consentantes », ou « quand elles ne touchent pas un centime sur ce qu'elles font », ou « quand elles sont obligées d'aller travailler dehors aux périphéries des villes ». Qu'elles soient putes de luxe, occasionnelles, au trottoir, vieilles, jeunes, douées, dominatrices, tox ou mères de famille ne fait a priori aucune différence. Echanger un service sexuel contre de l'argent, même dans de bonnes conditions, même de son plein gré, est une atteinte à la dignité de la femme. Preuve en est : si elles avaient le choix, les prostituées ne le feraient pas. Tu parles d'une rhétorique... comme si l'épileuse de chez Yves Rocher étalait de la cire ou perçait des points noirs par pure vocation esthétique.
[...]
Dans les médias français, articles documentaires et reportages radio, la prostitution sur laquelle on focalise est toujours la plus sordide, la prostitution de rue qui exploite des filles sans papiers. Pour son côté spectaculaire évident : un peu d'injustice médiévale dans nos périphéries, ça fait toujours de belles images. Et on aime colporter des histoires de femmes abusées, qui signalent à toutes les autres qu'elles l'ont échappé belle. Et aussi parce que celles et ceux qui travaillent dehors ne peuvent mentir sur leur activité, comme le font celles et ceux qui pratiquent via internet. On va chercher le plus sordide, on le trouve sans trop de difficulté, puisque justement c'est la prostitution qui n'a pas les moyens de se soustraire aux regards de tous. Filles privées de papiers, de consentement, travaillant à l'abattage, dressées par les viols, crackées, portraits de filles perdues. Plus c'est glauque, plus l'homme se sent fort, en comparaison. Plus c'est sordide, plus le peuple français se juge émancipé. Puis, partant des images inacceptables d'une prostitution pratiquée dans des conditions dégueulasses, on tire les conclusions sur le sexe tarifé dans son ensemble.
Virginie Despentes, King Kong Théorie (2006)
mercredi 9 décembre 2020
2020, un palmarès
mardi 8 décembre 2020
Un silence croisé
dimanche 6 décembre 2020
There's nothing left here
mercredi 2 décembre 2020
Un piège
lundi 30 novembre 2020
We discussed things
Il y a bien sûr tout ce qui a rapproché Nicole et Charlie dans Marriage Story, mais aussi maintenant ce qui les sépare. L'une de ces lignes de fracture rejoint l'opposition classique Los Angeles / New York (*).
Charlie à son fils, tandis qu'ils sont en voiture :
— If we were in New York we could be walking.
— But I like that we’re sitting right now. I like to sit.
— That’s true, Los Angeles does have sitting going for it.
Dans l'extrait suivant, le couple s'efforce de remettre leur rupture sur de bons rails :
Nicole : Maybe we can figure something out between us...
Charlie : You’ll remember I said this to you at the beginning.
— I know you did, but these are different circumstances.
— I was anticipating these circumstances
— Mm hm. Anyway... Shall we try this?
— OK. I don't know how to start.
— Do you understand why I want to stay in LA?
— No.
— Well, Charlie, that's not a useful way for us to start...
— I don't understand it.
— You don't remember promising that we could do time out there?
— We discussed things. We were married, we said things. We talked about moving to Europe, about getting a sideboard or what do you call it, a credenza, to fill that empty space behind the couch. We never did any of it.
Noah Baumbach, Marriage Story (2019)
dimanche 29 novembre 2020
Bouffée d'Art
Vues dans l'exposition monographique du duo d’artistes Brognon et Rollin, ces marqueteries de paille qui donnent à voir "l'attente dans sa construction"
vendredi 20 novembre 2020
L’invention de la ménagère
jeudi 19 novembre 2020
He loves all the things you’re supposed to hate
mercredi 18 novembre 2020
I've Made Up My Mind
Vous en avez rêvé (ou pas), ils l'ont fait, Bill Callahan (Smog) et Will Oldham (Palace brothers, Bonnie 'prince' Billy) chantent ensemble, dans une série de reprises publiées sur ce bandcamp.
C'est moins lo-fi et plus écoutable que leur collaboration présumée au sein de the Sundowners (Goatsong, 1994)
dimanche 15 novembre 2020
Je ne m'excuse de rien, je ne viens pas me plaindre
samedi 14 novembre 2020
You will remember this
dimanche 8 novembre 2020
Être adulte
Ultime extrait du texte écrit et lu par Franck Beauvais dans son film "Ne croyez surtout pas que je hurle".
Un vieil ami ne fait parvenir une photographie de moi prise il y a plus de vingt ans, dans la cage d'escalier de son immeuble parisien. Je reconnais vaguement ce jeune homme, fraîchement échappé de l’adolescence, aux joues pleines et au large sourire, encore un peu rose, l'air affable et insouciant. Je me remémore ses certitudes, sa satisfaction d’avoir tourné le dos à la grise province militaire dont il est issu, sa gourmandise de rencontre, de découvertes, de plaisir. Les yeux sombre mais luisant qui trahissent une assurance feinte et un soupçon de malice. J’éprouve un sentiment bizarre face à cette image déjà ancienne. Aucune nostalgie mais plutôt de la surprise. Je m’étais un peu oublié, moi qui ne possède aucun cliché des trente dernières années, et j’avais occulté le souvenir d’une soif de vivre, depuis totalement dissipée. Trois jours plus tard, le même ami est victime d’un infarctus alors qu’il découpe des légumes dans sa cuisine. Je crois d’abord à une mauvaise blague. Mais non. Par chance, il est sauvé à temps. J’ai longtemps vécu à l’abri du deuil, sans qu’aucun reproche ne me soit arraché. Avec le temps qui passe, l’assaut de l’âge, et depuis la disparition de mon père, je ne peux me défaire de l'impression que la mort et la maladie maraudent désormais autour de moi, me contraignent à me familiariser avec elle, à admettre la vulnérabilité des autres et la mienne. Partir. Voir partir. Me dire qu'être adulte, c’est probablement aussi apprendre à composer avec l’inéluctable.
Frank Beauvais, Ne croyez surtout pas que je hurle (2020)
jeudi 29 octobre 2020
Peur, insécurité, ignorance
vendredi 23 octobre 2020
10 ans, 40 albums (Part.8)
dimanche 18 octobre 2020
Are you lonely at night?
samedi 17 octobre 2020
10 ans, 40 albums (Part.7)
vendredi 9 octobre 2020
10 ans, 40 albums (Part.6)
Au premier rang de cette sélection, Kanye West bien sûr, avec l'incontournable "My beautiful dark twisted fantasy", sommet de sa carrière ? En tout cas selon moi, puisque je n'ai finalement que moyennement accroché aux albums précédents et suivants. Vient ensuite Talib Kweli, ancien complice de Mos Def au sein de Blackstar. Autre new-yorkais, quoique d'origine dominicaine, Homeboy Sandman ! Enfin, un pur représentant de l'abstract hip-hop à son meilleur, Marlow, aka l'alliance du emcee Solemn Brigham et du producteur l'Orange. Ce dernier a d'ailleurs bien failli placer deux albums dans ma sélection (cf. non-retenus ci-dessous)
jeudi 8 octobre 2020
Epiphanie
C’est parfois de la nature que survient une consolation inattendue. Une lumière singulière qui sature soudain les couleurs extérieures, nappant les frondaisons figées sous le soleil. Comme un appel pressant au vagabondage. Certains jours, où malgré ma turbulente impatience, mon esprit s’accorde instinctivement à la campagne telle qu’elle s’offre à mon regard. Je sors et m’engage sur un chemin dont je sais connaître le moindre caillou, et je redécouvre alors le décor magnifiée par des jeux d’ombres inédit : un chêne moribond transcendé par le contre-jour, la rivière, habituellement grise est insignifiante, emperlée de reflets adamantins. Le paysage dont j’étais certain d’avoir épuisé toutes les ressources et enregistré toutes les variations chromatiques contredit avec aplomb mon caractère désabusé. L’œil s’ouvre, palpite, cherche, trouve, l’esprit se libère, s’aplanit, les brumes résiduelles de l’angoisse se dispersent. L’horizon, sous l’effet de l’accident épiphanie se dégage. La forêt, ces jours-là, n’est que vibrantes et contagieuses promesses. L’avenir, lorsque l’on s’échappe de l’enchantement du moment présent pour y songer, s’y décline en d’innombrables possibles. Il suffirait d’un presque rien et je me sentirais perméable au bonheur, disposé à la sérénité, invité au voyage.
Frank Beauvais, Ne croyez surtout pas que je hurle (2020)
lundi 5 octobre 2020
10 ans, 40 albums (Part.5)
jeudi 1 octobre 2020
The Election That Could Break America
- Voter Caging : mailing de masse servant à détecter - en français - des NPAI ("N'habite plus à l'adresse indiquée"), permettant de mettre ultérieurement en doute puis d'invalider le vote des personnes concernées.
- Lying Flyers / Robocalls : distribution de prospectus mensongers (date de vote erronée, fausse allégation "impossibilité de voter si un membre de la famille a été reconnu coupable d'un crime"...), appels ciblés, par exemple envers les afro-américains leur disant que le candidat démocrate été déjà qualifié et qu'il ne servait à rien de se déplacer...
- Ceci s'ajoute aux dispositions légales de purge de liste électoral (qui parfois excluent des électeurs valides), de restriction du droit de vote (visant par exemple à exclure des anciens prisonniers) ou de définition de la liste des justificatifs d'identité valables (on pourra par exemple accepter les permis de port d'arme, et refuser les cartes d'étudiants)
vendredi 25 septembre 2020
10 ans, 40 albums (Part.4)
Ce vendredi 25 septembre, paraît "The Ascension", nouvel album de Sufjan Stevens. L'occasion de révéler le volet de ma sélection 10's dans lequel il figure!
mardi 22 septembre 2020
Both the most inessential and the most essential thing
Le quatrième album de Fleet Foxes est disponible en version numérique depuis aujourd'hui. Pour l'anecdote, il a été annoncé par des affiches collées dans Paris, et c'est par une photo twittée depuis la rue de Charonne que les medias américains ont découvert l'imminence de sa sortie.
Voici quelques mots de Robin Pecknold, leader de Fleet Foxes, qui accompagnent la sortie du disque. Il y parle de sa vie de musicien, discute créativité, dans le contexte de cette année 2020 si particulière.
Since the unexpected success of the first Fleet Foxes album over a decade ago, I have spent more time than I’m happy to admit in a state of constant worry and anxiety. Worried about what I should make, how it will be received, worried about the moves of other artists, my place amongst them, worried about my singing voice and mental health on long tours. I’ve never let myself enjoy this process as much as I could, or as much as I should. I’ve been so lucky in so many ways in my life, so lucky to be born with the seeds of the talents I have cultivated and lucky to have had so many unreal experiences. Maybe with luck can come guilt sometimes. I know I’ve welcomed hardship wherever I could find it, real or imagined, as a way of subconsciously tempering all this unreal luck I’ve had. By February 2020, I was again consumed with worry and anxiety over this album and how I would finish it. But since March, with a pandemic spiraling out of control, living in a failed state, watching and participating in a rash of protests and marches against systemic injustice, most of my anxiety around the album disappeared. It just came to seem so small in comparison to what we were all experiencing together. In its place came a gratitude, a joy at having the time and resources to devote to making sound, and a different perspective on how important or not this music was in the grand scheme of things. Music is both the most inessential and the most essential thing. We don’t need music to live, but I couldn’t imagine life without it. It became a great gift to no longer carry any worry or anxiety around the album, in light of everything that is going on. A tour may not happen for a year, music careers may not be what they once were. So it may be, but music remains essential. This reframing was another stroke of unexpected luck I have been the undeserving recipient of. I was able to take the wheel completely and see the album through much better than I had imagined it, with help from so many incredible collaborators, safe and lucky in a new frame of mind.
Fleet foxes, Shore (2020)