J'ai 35 ans et je n'en reviens pas. Disons que ça ne veut rien dire pour moi, si ce n'est le fait que je commence à apprivoiser ce corps capricieux et mutant. J'accepte la trahison de la peau, des cheveux. Je multiplie d'ailleurs avec plus ou moins de succès les expériences pharmaceutiques à base de shampooings antipelliculaires traitants, à la menthe ou au musc, selon les soirées arrosées ou non. J'apprécie les cures revitalisantes, les jus de bouleaux ou d'argousiers. J'aime l'idée d'un jet de Kärcher pour le corps, des poumons jusqu'à l'estomac en passant par le gros intestin dont la paroi doit être semblable aujourd'hui à des planches poreuses et merde, je devrais quand même penser à autre chose.
Notre appartement est calme et donne sur une rue à sens unique bordée de platanes, torturés jusqu'aux moignons par des cantonniers sans scrupule, la mairie a d'ailleurs décidé de les abattre (je veux dire les arbres) pour des questions de sécurité, à cause de l alcool, des voitures ou de la téléphonie mobile. Les voisins se sont rapidement mobilisés ainsi qu'une poignée d'écologistes en défilant devant la mairie brandissant des calicots ou il était question au feutre vert de citations orientales sur la nature et les hommes. Des landaus plus ou moins cossus les accompagnaient, donnant au convoi un caractère agréable, sincère et printanier. Nous n'avons pas osé nous joindre à eux. Pourtant il y a quelques mois de cela, j'étais monté pour la première fois jusqu'au dernier étage de l'immeuble pour assister à une pendaison de crémaillère. J'avais longuement hésité car mon indifférence envers mes voisins de palier m'a souvent donné raison. Vivre en appartement, ca n'est pas seulement apprendre des règles mais imposer. Il faut maintenir la distance animale nécessaire, se contenter d'un bonsoir dans l'escalier ou d'une modeste analyse météorologique. Ce soir-là, je n'avais tout simplement pas envie d'être seul avec elle, surtout lorsqu'on entend des rires dopés par le champagne traverser le papier à cigarettes qui me sert de plafond. J'avais discuté longuement avec un type du 4ème, qui cherchait depuis un certain temps un emploi et sans aucun doute de la compagnie. Nous étions tombés d'accord sur le fait que la piscine n'était pas si loin, et qu'il fallait dorénavant prendre soin de nous puisque pendant notre jeunesse, on en avait bien profité. J'avais par conséquent proposé (à deux, c'est plus stimulant) des séances de dos crawlé, de brasse papillon, de préférence en soirée. Pourtant les éclairages de piscine me révulsent. La plupart du temps, les pulvérisations accidentelles de chlore dans les narines me brûlent les sinus. J'ai tout naturellement laissé traîner les choses. D'ailleurs, lui non plus ne m'a pas appelé. Rien à foutre. Depuis peu, j'ai recommencé à déconner.
Notre appartement est calme et donne sur une rue à sens unique bordée de platanes, torturés jusqu'aux moignons par des cantonniers sans scrupule, la mairie a d'ailleurs décidé de les abattre (je veux dire les arbres) pour des questions de sécurité, à cause de l alcool, des voitures ou de la téléphonie mobile. Les voisins se sont rapidement mobilisés ainsi qu'une poignée d'écologistes en défilant devant la mairie brandissant des calicots ou il était question au feutre vert de citations orientales sur la nature et les hommes. Des landaus plus ou moins cossus les accompagnaient, donnant au convoi un caractère agréable, sincère et printanier. Nous n'avons pas osé nous joindre à eux. Pourtant il y a quelques mois de cela, j'étais monté pour la première fois jusqu'au dernier étage de l'immeuble pour assister à une pendaison de crémaillère. J'avais longuement hésité car mon indifférence envers mes voisins de palier m'a souvent donné raison. Vivre en appartement, ca n'est pas seulement apprendre des règles mais imposer. Il faut maintenir la distance animale nécessaire, se contenter d'un bonsoir dans l'escalier ou d'une modeste analyse météorologique. Ce soir-là, je n'avais tout simplement pas envie d'être seul avec elle, surtout lorsqu'on entend des rires dopés par le champagne traverser le papier à cigarettes qui me sert de plafond. J'avais discuté longuement avec un type du 4ème, qui cherchait depuis un certain temps un emploi et sans aucun doute de la compagnie. Nous étions tombés d'accord sur le fait que la piscine n'était pas si loin, et qu'il fallait dorénavant prendre soin de nous puisque pendant notre jeunesse, on en avait bien profité. J'avais par conséquent proposé (à deux, c'est plus stimulant) des séances de dos crawlé, de brasse papillon, de préférence en soirée. Pourtant les éclairages de piscine me révulsent. La plupart du temps, les pulvérisations accidentelles de chlore dans les narines me brûlent les sinus. J'ai tout naturellement laissé traîner les choses. D'ailleurs, lui non plus ne m'a pas appelé. Rien à foutre. Depuis peu, j'ai recommencé à déconner.
Florent Marchet - J'ai 35 ans
Rio Baril (Barclay, 2007)
www.myspace.com/florentmarchetmusic
Arnaud Cathrine
Rio Baril (Barclay, 2007)
www.myspace.com/florentmarchetmusic
Arnaud Cathrine
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