vendredi 29 novembre 2024

Un mauvais vivant

Il y a les bons et les mauvais
Je suis un mauvais vivant
En guerre, jamais en paix
Toujours prêt à contrer les bons vivants
Mauvais vivant
Cela dit bon perdant
Respirant lentement
Traînant, râlant, rechignant
Mais bien présent
Avançant à faible allure
Allant là où il vente
Toujours plus immature
Luttant contre la pente
J′avoue je vis en reculant
J'avoue je suis un peu lent
J′avoue je vis en reculant
Je suis un mauvais vivant
J'ai tout le temps de prendre
Du bon temps par mauvais temps
En attendant, je prends
La pose du mauvais vivant
Par les temps qui courent
Je marche lent, je suis un opposant
Je suis contre si vous êtes pour
Râlant, traînant, rechignant
Toujours à contretemps

Bertrand Betsch - Un mauvais vivant
La Soupe à la grimace (1997)

jeudi 21 novembre 2024

I am a prisoner here forever

D'un film à l'autre, changeons de pays, donc de culture et d'ambiance, direction la Finlande avec "les feuilles mortes". Premier Kaurismaki que je visionne, et ce film est une grande réussite, tant pour son histoire, ses personnages et la réalisation en tant que telle !

Beaucoup de plans statiques, donnant à voir une composition de personnages pensée ! Quelle coïncidence d'ailleurs de retrouver une affiche de Rocco et ses frères dans l'un d'eux !


Ansa (Alma Pöysti) dans son appartement :
 



Point d'orgue de ce film, qui rappelle autant Jarmush (pour son amour du rock et de la musique live) que Béla Tarr (dans la succession des plans), le morceau joué par le groupe finlandais Maustetytöt.


Cette scène peut s'apprécier ici. Dans chaque regard, transparaît une histoire, une existence...


[...]

because anyway I just mainly lie down
I don't leave my house, without a reason at least
forget me, I want to be alone
I was born to sorrow and clothed with disappointments

I am a prisoner here forever
fences surround the graveyard too
when finally my last worldly task would end
you still dig me deeper into the ground
I like you but can't stand myself
I don't need others, don't know about you
I admit, if I leave
I only do it for the sake of myself

Aki Kaurismaki, les feuilles mortes (2023)

Maustetytöt - Syntynyt suruun ja puettu pettymyksin
Eivät enkelitkään ilman siipiä lennä (2020)

vendredi 8 novembre 2024

On ne doit pas toujours pardonner

Le film "Rocco et ses frères" est éclairant, d'abord sur le contexte d'époque et cette immigration intérieure d'après-guerre, qui voient des familles du Sud pauvre de l'Italie rejoindre le Nord industriel et urbain... Ensuite pour faire comprendre à votre oncle réac' la définition de féminicide. Ce n'est pas en tant que simple "conjoint" qu'une femme est tuée, mais parce que l'homme considère qu'elle lui appartient, et que son existence ne saurait se poursuivre sans lui.

Dialogue de fin empreint de mélancolie, entre deux jeunes frères de Rocco, Ciro et Luca.

— Quand nous sommes venus à Milan, j'étais à peine plus âgé que toi, et c'est Simone qui m'a expliqué ce que Vincenzo n'a jamais compris. Il m'a expliqué que chez nous, là-bas, au pays, les hommes vivent comme des bêtes, à qui on apprend seulement deux choses, travailler et obéir. Alors que les hommes doivent vivre libres, sans être esclaves de qui que ce soit, et sans jamais oublier leur devoir. Seulement Simone a oublié tout cela, tu sais comme moi où ça l'a mené. Il a gâché sa vie, et il a amené la honte sur notre famille. Il a fait du mal à Rocco. Simone avait des racines robustes et saines. Seulement les mauvaises herbes les ont très vite étouffées. La trop grande bonté de Rocco est aussi dangereuse que la méchanceté de Simone. Rocco est un sain. Et que peut faire dans ce monde quelqu'un comme lui qui refuse de se défendre. Rocco est toujours prêt à pardonner à tous. On ne doit pas toujours pardonner.

— Si Rocco retourne au pays, moi j'irai avec lui.

 [...] Que crois tu trouver là-bas de différent ? Même chez nous la vie changera pour tous, parce que même chez nous les hommes sont en train d’apprendre que le monde doit changer. Il y en a qui disent que ce monde nouveau ne sera pas meilleur. Moi, je suis sûre du contraire et je sais que ta vie sera plus juste et plus honnête.

Luschino Visconti, Rocco et ses frères (1960)

lundi 4 novembre 2024

An american horror story

Le 1er octobre 2020, je titrais un article "The Election That Could Break America". Trump était alors président, et il était prévisible qu'il conteste les résultats en cas de défaite. Je rappelais par ailleurs "que même vainqueur [en 2016], il [avait] contesté l'avantage d’Hillary Clinton au vote populaire". Plus loin, sans doute nourri de lecture d'analystes politiques, j'écrivais : "Partant de là, tout est possible. Manifestations, violences, émeutes...". Ce qui s'est produit.

Cette fois, il n’est pas président sortant. Mais toujours candidat. Et le scénario catastrophe s'oriente vers des dizaines de contestations locales, doublées de recours juridiques en pagaille, qui pourraient chacun compromettre la désignation d'un vainqueur. 

The first rule is: attack, attack, attack.
Rule two: admit nothing, deny everything.
Rule three: no matter what happens, you claim victory and never admit defeat

Mais que sont ces règles ? Celles apprises à Donald Trump par son mentor (et conseiller juridique de Donald Trump de 1974 à 1986) Roy Cohn, telles que rapportées dans le film "The Apprentice".


Film habile qui nous à aide à comprendre la genèse de l'actuel candidat. Préparons nous à des semaines difficiles et riches en imprévu... et espérons une issue heureuse et pacifique. Loin de cette dystopie, sortie un peu plus tôt au cinéma


Civil War, Alex Garland (2024)
the Apprentice, Ali Abbasi (2024)
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Et pour qui s'intéresse à la genèse de Vladimir Poutine, lire (ou voir au théâtre), Le Mage du Kremlin (Giuliano da Empoli)