lundi 31 juillet 2017

Trouver un sens à notre existence

"Nous sommes nés pour regarder et pour écouter ce monde. Alors, même sans réussir dans la vie, nous pouvons trouver un sens à notre existence."

Les Délices de Tokyo, Naomi Kawase (2015)

dimanche 30 juillet 2017

Is this what we wanted ?


La vidéo du dimanche soir, ce sera ce joli clip pour ce retour surprenant de Julie Doiron (un poil vénèr ici, elle qui se révèle une crème en interview).
Ce titre annonce la sortie de l'album de Julie and the wrong guys début septembre, il devrait ravir celles et ceux qui ne sont pas contre une bonne rasade de guitare 90's.



Julie and The Wrong Guys - You Wanted What I Wanted
(Dine Alone Records, 2017)

vendredi 28 juillet 2017

Des qualités d'un genre particulier

Durant les deux premières années de mon mariage, mes rapports avec ma femme furent, je puis aujourd'hui l'affirmer, parfaits. Je veux dire que pendant ces deux années l'accord complet et profond de nos sens s'accompagnait de cet obscurcissement ou, si l'on préfère, de ce silence de l'esprit qui, en de telles circonstances, suspend toute critique et s'en remet à l'amour seul pour juger la personne aimée. Emilia me semblait absolument sans défauts et je crois que je paraissais tel à ses yeux. Ou peut-être voyais-je ses défauts et voyait-elle les miens, mais, par une transmutation mystérieuse due à l'amour, ils nous semblaient à tous deux non seulement pardonnables mais en quelque sorte aimables, comme si au lieu de défauts ils eussent été des qualités d'un genre particulier. Bref, nous ne nous jugions pas : nous nous aimions. L'objet de ce récit est de raconter comment, alors que je continuais à l'aimer et à ne pas la juger, Emilia au contraire découvrit ou crut découvrir certains de mes défauts, me jugea et, en conséquence, cessa de m'aimer.

Le Mépris, Alberto Moravia (1963)
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Sur le même sujet : les extraits de ce roman qui suivront, bien sûr, mais aussi :

mercredi 26 juillet 2017

This is my life

(Si besoin, cliquez pour agrandir)


Glyn Dillon, Le Nao de Brown (2013)

vendredi 21 juillet 2017

[Playlist] Love Again

Cela faisait bien trop longtemps que je n'avais pas publié de playlist ici ! En préparant celle-ci, et preuve que cette moitié d'année 2017 a été riche, je me suis donc retrouvé avec plus de 3h de musique... ramenées aujourd'hui à 1h30 / 25 titres. A la manière de Top Tape, l'enchaînement des titres est pensé, ceci m'obligeant à regret à en recaler certains.

Grâce à Soundgood, vous pouvez écouter cette playlist ici-même, ou tout simplement me suivre sur spotify ou deezer (arisetherefore).



A l'honneur de cette édition, Girlpool, pour celles et ceux d'entre vous qui se poseraient la question du groupe en photo)

jeudi 20 juillet 2017

le poids des ans

Tour d'Italie, 1949. La rivalité Coppi-Bartali, entamée en 1940, est à son comble. Le premier, ancien co-équipier du second, devait l'égaler puis le dépasser au nombre de "Giro" remportés. Coppi est aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands coureurs de l'histoire du cyclisme, ce qui lui vaut le surnom de « campionissimo ». Quant à Bartali...

C'est un vaincu, Bartali, aujourd'hui. Pour la première fois. voilà qui nous remplit d'amertume, car cela nous rappelle intensément notre sort commun à tous. Aujourd'hui, pour la première fois, Bartali a compris qu'il était arrivé à son crépuscule. Et pour la première fois il a souri. C'est de nos propres yeux que nous avons constaté le phénomène lorsque nous sommes passés à côté de lui. Quelqu'un l'a salué sur le bord de la route. Et lui, tournant légèrement la tête dans cette direction-là, il a souri : l'homme hargneux, distant, antipathique, l'ours intraitable aux incessantes grimaces de mécontentement, lui, précisément : il a souri. Pourquoi as-tu fait cela, Bartali ? Ne sais-tu pas qu'en agissant ainsi tu as détruit cette sorte d'enchantement revêche qui te protégeait? Les applaudissements, les vivats des gens que tu ne connais pas commencent-ils à t'être chers ? Est-il donc si terrible le poids des ans? Tu t'es rendu, enfin.

Dino Buzzati, Sur "le Giro" (1949)

mercredi 19 juillet 2017

Les laissés-pour-compte du temps maximum

En 1949, le Corriere della Sera confie à Dino Buzzati la couverture quotidienne du tour d'Italie dans ses colonnes. Prophane en matière de cyclisme, l'écrivain apportera sa touche personnelle, en s'éloignant de la chronique purement sportive et en s'attachant parfois à des aspects connexes de la course.
Ainsi, le 30 mai, il s'attarde sur les derniers coureurs de l'étape, ceux qu'il appelle "les laissés-pour-compte du temps maximum". On retrouve bien là l'auteur du "désert des tartares" (1940) et sa conception malléable du temps.
Extrait.

Déjà le soleil décline entre des halos rougeâtres qui poudroient, et la foule continue de défiler. Des courants toujours plus tumultueux viennent déferler contre lui, qui progresse péniblement. [...] A présent il est seul.

Les gens le heurtent, il est ballotté de-ci de-là ; une automobile, avec les gémissements plaintifs de sa sirène, le contraint à marquer le pas. La lueur du jour s'estompe, voici que s'allument les réverbères. «Où est le stade? » demande-t-il. Les gens font un signe vague, comme s'ils étaient agacés. « Je vous en prie, je vous en prie », implore-t-il d'une voix faible. Mais déjà il fait nuit. Combien d'heures se sont écoulées depuis que les premiers sont arrivés ? Combien de jours ? Ou de mois ? La nuit est sombre, et au-delà de la foule les lumières des cafés scintillent. Et, sans cesse renouvelée, la cohue : une coulée de lave noire qui vient à sa rencontre, hostile. «Où est le stade?» demande-t-il. «Quel stade?» répondent les gens. «Celui du Giro d'Italia.» «Ah, le Giro d'Italia... c'était la belle époque... » et ils secouent la tête, pleins de pitié. Non pas des heures non pas des jours ni des mois : ce sont donc des années entières qui se sont écoulées depuis que les premiers sont arrivés. Et lui, il est seul. Et il fait froid. Et sa fiancée se promené en compagnie d'un autre ; ou peut-être s'est-elle déjà mariée... « Où est le stade ? » supplie-t-il. «Stade? répondent-ils. Giro d'Italia? Qu'est-ce que cela signifie?».

Dino Buzzati, Sur "le Giro" (1949)

lundi 17 juillet 2017

Dreams to remember

Honey, I saw you there last night
Another man's arms holding you tight
Nobody knows what I feel inside
All I know, I walked away and cried

I've got dreams to remember
I've got rought dreams to remember

I know you said he was just a friend
But I saw him kiss you again and again
These eyes of mine, they don't fool me
Why did he hold you so tenderly?

I've got dreams to remember
I've got rought dreams to remember,

I still want you to stay
I still love you anyway
I don't want you to ever leave
Girl, you just satisfy me, ooh-wee

I know you said he was just a friend
But I saw you kiss him again and again
These eyes of mine, they don't fool me
Why did he hold you so tenderly?

I've got dreams to remember
I've got bad dreams, rough dreams to remember
Don't make me suffer,
I've got rough dreams, bad dreams to remember

Otis Redding, I've got dreams to remember (1968)
in
the Leftovers, The book of Nora
(Damon Lindelof / Tom Perrotta, 2016)


*
*          *


Tristesse, puisque "the Leftovers" est bel et bien terminé. Cette chanson est extraite de la bande originale du dernier épisode (s3e08). Si la qualité scénaristique de certaines séries réside dans la succession haletante des actions et rebondissements, "the Leftovers" se distingue avant tout par sa liberté d'écriture, et l'exploration de territoires narratifs inconnus. A bien y réfléchir, cet aspect m'aura rappelé "Lost"... Je devais apprendre plus tard que les deux séries partageaient leur (co-)scénariste : Damon Lindelof.

Sur la base d'un événement initial expédié en 2min30 (la disparition simultanée, soudaine et inexpliquée d'une frange de la population mondiale de l'ordre de 2%), cette série montre des personnages, jamais loin de perdre pied, se débattrent avec le monde d'après. Chacun à sa manière, seul ou en groupe, avec ou sans prosélytisme, pétri de doutes ou de certitudes.

Beaucoup de ces pistes, même prometteuses, s'avéreront des impasses... Elles servent néanmoins la série puisqu'elles participent de son atmosphère générale d'une part, et occasionnent des scènes incroyablement fortes d'autre part (magnifiées par la bande originale de Max Richter).

Sur le plan des personnages, et malgré leur profondeur, je dois bien convenir que bien peu auront gagné ma sympathie. Etrange : j'aurais pourtant juré qu'un tel critère était déterminant pour que j'adhère à une série. Il faut dire que Kevin Garvey (Justin Theroux, par ailleurs vu dans "Mulholland Drive" dans le rôle du réalisateur Adam Kesher) et Nora Durst (Carrie Coon, vue dans "Gone Girl", et la troisème saison de "Fargo") l'emportent tout. Qu'on donne tout de suite à cette actrice la récompense qu'elle mérite, bon sang ! Elle, qui interprète son personnage jusqu'à la plus fugace micro-expression.

The Leftovers, 3 saisons, 28 épisodes dont un "final" admirablement pensé et qui conclut le tout en beauté : un rêve dont vous vous rappellerez.

jeudi 13 juillet 2017

Poster of the Week

un visuel une nouvelle fois très réussi pour La Villette
(sorry for the potato quality)

mercredi 12 juillet 2017

I've seen the light

Ce que montre l'exposition, c'est que Vermeer n'est pas toujours l'initiateur de ces scènes de genre raffinées et élégantes. Il intervient plutôt en fin de chaîne, il est celui qui réagit, transforme par soustraction, par épuration. Et tout ce qu'il enlève, il le remplace par de la lumière et de l’espace  — qui sont les vrais sujets de sa peinture…

Blaise Ducos, commissaire de l’exposition Vermeer au Louvre (2017)

L'exposition a pris fin le 22 mai dernier et donnait à voir un nombre important des toiles du maîtres, au regard de sa production somme toute limitée (on parle de 37 tableaux)...
J'en retiens par exemple retenu "La Femme à la Balance" (1662)



Bien sûr, sa peinture, ses sujets, sa lumière, ont fait date, jusqu'à influencer, qui sait, la "photographie" de récentes séries...


 
The Handmaid's Tale (Bruce Miller)

lundi 10 juillet 2017

Un art de la servilité

Une étude publiée il y a cinq ans l’exprimait parfaitement. On faisait passer à des petits garçons et des petites filles de 5-6 ans un faux casting pour une pub de yaourt. Et sans leur dire, on avait salé le yaourt. Les petits garçons, sans exception, font beurk devant la caméra, car le yaourt est infect. Les petites filles, elles, font semblant de l’aimer. Elles ont compris qu’il faut d’abord penser à celui qui les regarde et lui faire plaisir. Eh bien c’est exactement cela la féminité : ne sois pas spontanée, pense à l’autre avant de penser à toi, avale et souris. Tout est dit.

[Elle ne peut se résumer à cela,] non, bien sûr. Et je ne vais pas expliquer à des femmes qui se sentent bien dans ce cadre qu’elles doivent en sortir. Mais franchement, quand je vois ce qu’on exige des femmes, le carcan de règles et de tenues qu’on leur impose, leur slalom périlleux sur le désir des mecs et la date de péremption qu’elles se prennent dans la gueule à 40 ans, je me dis que cette histoire de féminité, c’est de l’arnaque et de la putasserie. Ni plus ni moins qu’un art de la servilité.

Virginie Despentes, en interview dans Le Monde (08-07-2017)

samedi 8 juillet 2017

Pour de vrai

Un de ces passages qui font le sel de "Vie et Destin"...
Un de ces moments par lequel tout enfant est passé...

Les étals de boucherie le fascinaient et le repoussaient. David vit des hommes décharger un corps de veau mort, sa langue pâle pendait et le pelage frisotté sur son cou était taché de sang.
La grand-mère acheta une petite poule tachetée et elle la portait en la tenant par ses pattes qu'attachait un petit chiffon blanc ; David marchait à côté et s'efforçait d'aider la poule à lever sa tête qui pendait sans force ; il s'étonnait de voir sa grand-mère faire preuve soudain d'une cruauté si inhumaine.
Il se souvint des paroles incompréhensibles de sa mère disant que la famille du côté de son grand-père était de tradition intellectuelle mais que, du côté de la grand-mère, c'étaient tous des boutiquiers. C'était sûrement pour cela que sa grand-mère n'avait pas pitié de la poule.
Ils pénétrèrent dans une cour, un vieillard, coiffé d'une calotte, sortit à leur rencontre et la grand-mère prononça quelques phrases en yiddish. Le petit vieux prit la poule, marmonna quelque chose, la poule, rassurée, caquetait. Puis il fil un geste rapide, à peine perceptible mais sûrement horrible, et jeta la poule par-dessus son épaule ; elle poussa un cri et se sauva en battant des ailes, et le garçon vit qu'elle n'avait plus de tête, seul courait un corps sans tête ; le petit vieux l'avait tuée. Apres quelques pas, le corps tomba et griffa le sol de ses pattes jeunes et puissantes puis cessa de vivre.
Au cours de la nuit, David eut l'impression qu'une odeur humide de vaches abattues et d'enfants égorgés pénétrait dans la chambre.
La mort, qui vivait jusqu'alors dans une image de forêt où une image de loup guettait une image de chevreau, quitta ce jour-là les pages du livre de contes. Pour la première fois, il comprit avec une acuité extraordinaire que lui aussi mourrait un jour, pas dans un conte mais pour de vrai.
Il comprit qu'un jour sa mère mourrait. La mort, la sienne, celle de sa mère, ne viendrait pas de la forêt imaginaire où des sapins se dressent dans la pénombre, elle viendrait de l'air qui l'entoure, des murs de sa chambre, de sa vie, et il était impossible de se cacher.
Il ressentit la mort avec l'acuité et la profondeur dont seuls les enfants et les grands philosophes sont capables.

Vassili Grossman, Vie et destin (1962/1980)

mercredi 5 juillet 2017

This is not a love song

Retour en images sur le festival nîmois
(grâce à la galerie photo de leur site internet)
[Crédits Photo : Boris Allin (1), Stéphane RIP (2), Yoann Galiotto (3), Adelap (4), Gabriel Popoff (5), Martin Hugo (6), et Arise Therefore (*)]

Yassassin (1)

Andy Shauf (2)

the Make-Up (1)

mardi 4 juillet 2017

Under skin is where I hide

Ian McCulloch est un de ces chanteurs à l'ego dilaté comme l'Angleterre savait en produire dans les années 80/90 (je pense notamment à Ian Brown des Stone Roses, et à Liam Gallagher d'Oasis).

Lui et son groupe, Echo and the Bunnymen se produisaient à TINALS, ce qui m'a redonné envie en rentrant de réécouter leur album de 1997, Evergreen, dont j'extrais aujourd'hui ces paroles.


I want it now
I want it now
Not the promises of what tomorrow brings
I need to live in dreams today
I'm tired of the song that sorrow sings

And I want more than I can get
Just trying to forget

I'd walk to you through rings of fire
And never let you know the way I feel
Under skin is where I hide
The love that always gets me on my knees

And I want more than I can get
Just trying to forget

Nothing ever lasts forever

I want it now
I want it now
Don't tell me that my ship is coming in
Nothing comes to those who wait
Time's running out the door you're running in

So, I want more than I can get
Just trying to forget

Nothing ever lasts forever
All the shadows and the pain
Are coming to you

Echo and the Bunnymen, Nothing ever lasts forever
Evergreen (London records, 1997)

- - -
Le saviez-tu : Après avoir quitté Echo and the Bunnymen en 1988, et entamé une carrière solo, Ian McCulloch a enregistré un album avec Johnny Marr (the Smiths). Intitulé "Touch Down", il aurait dû paraître en 1994... avant d'être retardé par le label... puis que les bandes "disparaissent".

dimanche 2 juillet 2017

Perdu


La vidéo du dimanche soir, c'est ce court-métrage, signé Michel Gondry (et commandé par Apple).
Déception, vu qu'une lecture trop rapide d'un publicité dans le métro, associée au visuel de l'affiche m'avait laissé croire que c'était une réalisation du génial Quentin Dupieux...

In fine, les univers partagent effectivement quelques traits communs (les objets animés façon "Rubber", la représentation d'une banlieue pavillonnaire comme dans "Wrong / Wrong Cops"), et puis, Michel Gondry, c'est quand même pas si mal.

Verdict (en paraphrasant le système d'évaluation du Canard Enchaîné) :
"On peut voir".

Détour, Michel Gondry (2017)