Dans son Traité des Excitants Modernes (thème d'une exposition temporaire à la Maison de Balzac, organisée par les Siestes Electroniques fin janvier), Balzac discourt successivement sur les effets de cinq substances : l’alcool, le sucre, le thé, le tabac et le café.
Le texte n'est pas particulièrement brillant et paraît aujourd'hui daté. C'est cependant une curiosité, d'autant qu'il recèle des passages instructifs éclairant sur les pratiques d'écriture de son auteur.
On sait en effet que Balzac carburait au café, ce qui lui conférait une force de travail impressionnante.
Enfin, j’ai découvert une horrible et cruelle méthode [...], il s’agit de l’emploi du café moulu, foulé, froid et anhydre (mot chimique qui signifie peu d’eau ou sans eau) pris à jeun. Ce café tombe dans votre estomac, qui, vous le savez par Brillat-Savarin, est un sac velouté à l’intérieur et tapissé de suçoirs et de papilles; il n’y trouve rien, il s'attaque à cette délicate et voluptueuse doublure, il devient une sorte d’aliment qui veut ses sucs, il les tord, il les sollicite comme une pythonisse appelle son dieu, il malmène ces jolies parois comme un charretier qui brutalise de jeunes chevaux; les plexus s’enflamment, ils flambent et font aller leurs étincelles jusqu'au cerveau. Dès lors, tout s'agite : les idées s'ébranlent comme les bataillons de la grande armée sur le terrain d’une bataille, et la bataille a lieu. Les souvenirs arrivent au pas de charge, enseignes déployées; la cavalerie légère des comparaisons se développe par un magnifique galop; l’artillerie de la logique accourt avec son train et ses gargousses; les traits d’esprit arrivent en tirailleurs; les figures se dressent; le papier se couvre d’encre, car la veille commence et finit par des torrents d’eau noire, comme la bataille par sa poudre noire.
Honoré de Balzac, Traité des excitants modernes (1839)
Toile d'araignée tissée sous caféine. La métaphore arachnéenne est souvent utilisée pour décrire le processus de création littéraire |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire