lundi 15 septembre 2014

Rêve et refoulement

Je pouvais difficilement citer Freud dans ces colonnes, sans que la notion de refoulement ne soit abordée...

Si je poursuis l'analyse [du rêve] pour moi-même, [...], je parviens en fin de compte à des pensées qui me surprennent, que je ne me savais pas avoir en moi, qui ne sont pas seulement étranges pour moi mais aussi désagréables et que pour cette raison j’aimerais contester énergiquement, alors que l’enchaînement de pensées que parcourt l’analyse me les impose inexorablement. Je ne peux tenir compte de cet état de choses tout à fait général autrement qu’en admettant que ces pensées ont effectivement existé dans ma vie psychique et quelles ont été en possession d’une certaine intensité ou énergie psychiques, mais quelles se seraient trouvées dans une situation psychologique particulière, par suite de laquelle elles ne pouvaient me devenir conscientes. J’appelle cet état particulier celui du refoulement. Je ne puis alors me dispenser d’établir une liaison causale entre l’obscurité du contenu du rêve et l'état de refoulement de certaines pensées du rêve, leur incapacité d'accéder à la conscience, et de conclure que le rêve doit être obscur pour ne pas trahir les pensées prohibées. J’en arrive ainsi au concept de la déformation du rêve, qui est l’œuvre du travail du rêve et qui sert à la dissimulation, à l’intention de cacher.

Pour Freud, le travail de déformation du rêve dont traitaient les précédents extraits que je vous rapportais, est donc motivé. Un peu plus loin, il divisera les rêves en trois catégories, selon que le désir sous-jacent y est plus ou moins clairement exprimé.

D'abord, ceux qui figurent sans voile un désir non refoulé; ce sont les rêves du type infantile, qui deviennent toujours plus rares chez l’adulte. Deuxièmement, ceux qui expriment, sous une forme voilée, un désir refoulé; cette classe comprend sans doute la très grande majorité de tous nos rêves, qui ont ensuite besoin de l'analyse pour être compris. Troisièmement, les rêves régulièrement accompagnés d’une angoisse qui interrompt le rêve. L'angoisse est ici le substitut de la déformation du rêve; elle n'a été épargnée aux rêves de la deuxième classe que par le travail du rêve. On peut prouver sans trop de difficulté que le contenu de représentation qui nous dispense à présent de l’angoisse dans le rêve a été jadis un désir, qui a depuis ce temps succombé au refoulement.

Sigmund Freud, Sur le rêve (1901)

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