lundi 29 juillet 2013

Il ne faut pas confondre

C'est l'été, on a un peu plus le temps qu'à l'accoutumée de procéder à des "disambiguations" utiles, et ainsi de mettre fin à des confusions résiduelles.

J'ai longtemps confondu les noms Neko Case et Nikki Sudden...

Neko Case, membre du "super groupe" the New Pornographers (aux côtés de Dan Bejar de Destroyer, et Carl "AC" Newman). Elle mène également une carrière solo (qu'on peut tout à fait ignorer)

Nikki Sudden est ce songwriter anglais, réédité au début des années 2000 chez Secretly Canadian (c'est comme ça que je connais). Il a écrit des beaux morceaux comme ça, et est décédé en 2006 d'une crise cardiaque après un ultime concert donné à New York

Plus récemment est apparu Niki and the Dove, duo suédois d'indietronica (chez Sub Pop). Ici, Malin Dahlström (qui ne s'appelle donc pas du tout Niki)

Je termine la série par un profil bien différent, un poids lourd des ventes de disques, connu de tous : Nicki Minaj.

Pas facile de trouver une photo d'elle qui ne fasse pas mal aux yeux.

samedi 27 juillet 2013

Tentative d'épuisement d'un lieu parisien

(Extrait)

Il y a beaucoup de choses place Saint-Sulpice, par exemple : une mairie, un hôtel des finances, un commissariat de police, trois cafés dont un fait tabac, un cinéma, une église à laquelle ont travaillé Le Vau, Gittard, Oppenord, Servandoni et Chalgrin et qui est dédiée à un aumônier de Clotaire II qui fut évêque de Bourges de 624 à 644 et que l'on fête le 17 janvier, un éditeur, une entreprise de pompes funèbres, une agence de voyages, un arrêt d' autobus, un tailleur, un hôtel, une fontaine que décorent les statues des quatre grands orateurs chrétiens (Bossuet, Fénelon, Fléchier et Massillon), un kiosque à journaux, un marchand d'objets de piété, un parking, un institut de beauté, et bien d'autres choses encore.
Un grand nombre, sinon la plupart, de ces choses ont été décrites inventoriées, photographiées, racontées ou recensées. Mon propos dans les pages qui suivent a plutôt été de décrire le reste : ce que l'on ne note généralement pas, ce qui ne se remarque pas, ce qui n'a pas d'importance : ce qui se passe quand il ne se passe rien, sinon du temps, des gens, des voitures et des nuages.

[...]

La date : 20 octobre 1974
L'heure : 13 h. 05
Le lieu : Café de la Mairie

Depuis pas mal de temps déjà (une demi-heure ?) un flic se tient debout, immobile, lisant quelque chose, sur la bordure du terre-plein, entre l'église et la fontaine, tournant le dos à l'église.
Un taxi deux vélomoteurs une Fiat une Peugeot une Peugeot une Fiat une voiture dont j'ignore la marque
Un homme, qui court
Eclaircie. Aucune voiture. Puis cinq. Puis une.
Des oranges dans un filet.
Michel Martens, avec un parapluie géranium
Le 63
Le 96
Une ambulance de l'assistance publique (hôpitaux de Paris)
Un rayon de soleil. Du vent. Tout au fond, une voiture jaune
Un car de police. Quelques voitures. Un car Atlas Reiser
Un homme dont le bras gauche est pris dans un plâtre
Un 63 qui s'arrête exceptionnellement an coin de la rue des Canettes pour laisser descendre un couple de gens âgés
Un taxi DS de couleur verte
Une voiture jaune (la même) émerge de la rue Saint-Sulpice et, s'engage sur la partie carrossable du parvis
Juste en face du café, il y a un arbre : une ficelle est nouée autour du tronc de l'arbre.
Tout au fond, près de la rue Férou, la voiture jaune se gare
Le parvis est absolument vide : il est une heure vingt-cinq.
L’agent fait toujours les cent pas sur la bordure du terre-plein, venant parfois jusqu'au coin de la rue Saint-Sulpice ou s'éloignant presque juste devant l’hôtel des finances.
Le 96
En ne regardant qu'un seul détail, par exemple la rue Férou, et pendant suffisamment de temps (une à deux minutes), on peut, sans aucune difficulté, s'imaginer que l'on est à Étampes ou à Bourges , ou même quelque part à Vienne (Autriche) où je n'ai d'ailleurs jamais été.
Surveillé, on plutôt excité par son maître, un chien noir gambade sur le terre-plein.
Aboiements
Passe un jeune papa portant son bébé endormi sur son dos (et un parapluie à la main)
Le parvis serait vide si le flic ne l'arpentait
Le 63
Le 96
Au fond, deux garçons en anoraks rouges
Une Volkswagen bleu foncé traverse le parvis (je l'ai déjà vue)
Rareté des accalmies totales : il y a toujours un passant au loin, ou une voiture qui passe
Le 96
Des touristes se photographient devant l'église
Le parvis est vide. Un car de touristes (Peters Reisen), vide, le traverse
Le 63
Il est deux heures moins cinq
Les pigeons sont sur le terre-plein. Ils s'envolent tous en même temps.
Quatre enfants. Un chien. Un petit rayon de soleil. Le 96. Il est deux heures.


Georges Perec, Tentative d'épuisement d'un lieu parisien (1975)
(plus)

mercredi 24 juillet 2013

La danse des poignards

Après avoir introduit Schopenhauer par des aspects périphériques (et néanmoins fondamentaux) de son oeuvre (Critique de la Philosophie kantienne), je vais désormais en venir au coeur du "Monde comme Volonté et Représentation".

Le premier livre traite du monde comme représentation, çàd comme objet du sujet. Analysant la représentation comme soumise au principe de raison, Schopenhauer finit ce livre en abordant la raison "pratique".

La lecture de différents textes m'aura appris, que dès qu'on emploie l'épithète "pratique" en philo, c'est qu'on s'apprête à discourir de la manière dont une philosophie peut s'appliquer dans le comportement et les actions des Hommes. En bref, on va sans doute finir par parler morale ou vertu (*).
Ce faisant, Schopenhauer s'attarde un moment sur les idées de l'école stoïcienne, dont les principes visent à s'aider de la raison pour atteindre le bonheur (dans tout ça, la vertu est moyen, et non finalité). Ca donne des préceptes tels que :

Comment peux-tu passer doucement tes jours,
Si tu dois te laisser mener et tourmenter par un désir toujours insatisfait
Par la crainte, par l'espérance de biens peu utiles
(Horace)


Facile, certes. Mais utile si l'on comprend que, poussée à l'extrême, la logique de convoiter / acquérir ne peut qu'aboutir à un cycle frustration / ennui. Intéressante pour qui se rebiffe contre le consumérisme à outrance.

Je zappe intentionnellement les maximes qui pourraient sembler prôner l'ascétisme, ou celles aisément caricaturables en éthique de loser (« Ne demande pas que les choses arrivent comme tu le désires mais désire-les telles qu'elles arrivent et tu seras heureux. »), pour passer à cette pensée d'Epitecte, telle que la rapporte par Schopenhaueur

« Il faut penser et distinguer entre ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas et, ensuite, ne tenir aucun compte de ce qui ne dépend pas de nous, moyennant quoi on restera de manière assurée indemne de toute douleur, souffrance et angoisse. »


*
*    *

Puisque les stoïciens sont mes amis, ceux de Schopenhauer et d'Alain aussi, je termine cet article en citant un texte de ce dernier, intitulé "La danse des poignards" et extrait de ses célèbres "Propos sur le Bonheur".

Chacun connaît la force d’âme des stoïciens. Ils raisonnaient sur les passions, haine, jalousie, crainte, désespoir et ils arrivaient ainsi à les tenir en bride, comme un bon cocher tient ses chevaux.
Un de leurs raisonnements qui m’a toujours plu et qui m’a été utile plus d’une fois, est celui qu’ils font sur le passé et l’avenir. «Nous n'avons, disent-ils, que le présent à supporter. Ni le passé, ni l’avenir ne peuvent nous accabler, puisque l’un n’existe plus et que l’autre n’existe pas encore.»

C’est pourtant vrai. Le passé et l’avenir n’existent que lorsque nous y pensons ; ce sont des opinions, non des faits. Nous nous donnons bien du mal pour fabriquer nos regrets et nos craintes. J’ai vu un équilibriste qui ajustait une quantité de poignards les uns sur les autres ; cela faisait une espèce d’arbre effrayant qu’il tenait en équilibre sur son front. C’est ainsi que nous ajustons et portons nos regrets et nos craintes en imprudents artistes. Au lieu de porter une minute, nous portons une heure ; au lieu de porter une heure, nous portons une journée, dix journées, des mois, des années. L’un, qui a mal à la jambe, pense qu’il souffrait hier, qu’il a souffert déjà autrefois, qu’il souffrira demain ; il gémit sur sa vie tout entière. Il est évident qu’ici la sagesse ne peut pas beaucoup; car on ne peut pas toujours supprimer la douleur présente. Mais s’il s’agit d’une douleur morale, qu’en restera-t-il si l’on se guérit de regretter et de prévoir ?

Cet amoureux maltraité, qui se tortille sur son lit au lieu de dormir, et qui médite des vengeances corses, que resterait-il de son chagrin s’il ne pensait ni au passé, ni à l’avenir ? Cet ambitieux, mordu au coeur par un échec, où va-t-il chercher sa douleur, sinon dans un passé qu’il ressuscite et dans un avenir qu’il invente ? On croit voir le Sisyphe de la légende qui soulève son rocher et renouvelle ainsi son supplice.

Je dirais à tous ceux qui se torturent ainsi : pense au présent ; pense à ta vie qui se continue de minute en minute ; chaque minute vient après l’autre ; il est donc possible de vivre comme tu vis, puisque tu vis. Mais l’avenir m’effraie, dis-tu. Tu parles de ce que tu ignores. Les événements ne sont jamais ceux que nous attendions ; et quant à ta peine présente, justement parce qu’elle est très vive, tu peux être sûr qu’elle diminuera. Tout change, tout passe. Cette maxime nous a attristés assez souvent ; c’est bien le moins qu’elle nous console quelquefois.

AlainPropos sur le bonheur (1925)
Arthur Schopenhauer, Le Monde comme Volonté et Représentation (1819)


(*) Peut-être ma prof de philosophie en terminale avait-elle tenté de m'avertir, mais j'avoue n'avoir pas du tout été attentif durant ces heures du samedi matin.

mardi 23 juillet 2013

Pitchfork Festival 2013 (Days One, Two, Three)

Le festival Pitchork se tenait le WE dernier dans la banlieue de Chicago. Vous n'y étiez pas, moi non plus... Pas grave ; comme il est de tradition dans ces colonnes, voici quelques clichés pris à cette occasion, les 19.20 et 21 Juillet.

Foxygen
Woods
Waxahatchee
Savages
Autre Ne Veut
Mac DeMarco
Lil'B
the Breeders - Kelley, on est d'accord? Pas Kim...
M.I.A.
Solange
Mikal Cronin...
... et sa batteuse
Joanna Newsom
Stuart Murdoch (Belle and Sebastian)

Crédits photo :
Ebru Yildiz + Erez Avissar (P4K)
Amanda Hatfield (Brooklyn Vegan)

lundi 22 juillet 2013

Getting profiled


"The suspect is likely a white male, in his late twenties to late thirties. He likely is not a college graduate, but feels nonetheless superior to those with advanced education, and is likely employed in a bureaucratic entity, possibly civil service or quasi-public service, from which he feels alienated. He has a problem with authority and a deep-seated resentment of those who he feels have impeded his progress professionally. [...] The suspect has trouble with lasting relationships and is possibly a high-functioning alcoholic with alcohol being utilised as a trigger in the commission of these crimes. His resentment of the homeless may stem from a personal relationship with someone who is in that cohort, or his victimisation of vagrants might merely represent an opportunity for the killer to assert his superiority and intellectual prowess."

the Wire, David Simon (S05)

(Cette fois encore, avec le son, c'est mieux... mais ça SPOILE légèrement, attention)

jeudi 18 juillet 2013

Album Cover of the Week / Album of the Year (so far)

Cet album est magique, je n'en décolle pas depuis un bon mois. Candy Claws vient du Colorado, ils sont trois, font de la "dream pop", mais pas juste douce et plaisante à écouter : Le mix, déroutant au premier abord, est tel qu'on se retrouve immergé au beau milieu d'un univers foisonnant.


More than our lyrics or even our visuals, the sound of the records are shaped by their themes. [...]. For “Ceres and Calypso” the mix got super compressed [...] as we sent it back through time and the music became mangled by time dilations, hidden dimensions, magma swell and magnetic thaw. [via]

Dans ce concept album, les "temps reculés" ("Deep Times") sont ceux de l'Ere Secondaire (le Mésozoïque). On les traverse, période par période (du Trias au Crétacé en passant par le Jurassique), guidé par les textes du poète chicagoan Jenn Morea.

Un disque qui devrait malheureusement rester assez confidentiel : une sortie vinyle/digitale uniquement (*), peu ou pas de concert (soit que le groupe se retranche derrière un Online World Tour, soit que deux de ses membres privilégient en ce moment même un long séjour naturaliste en Europe)...

Ci-dessous un player avec l'album complet. Tous les morceaux sont bien, si vous deviez n'en écoutez qu'un, allez, disons peut-être la 10, non la 3, ou la 2, à moins que la 5, ca y est je sais, la 8 !



Candy Claws, Ceres and Calypso in the Deep Time
(Two Syllable Records, 2013)
www.candyclaws.com

(*) et K7 en version instrumentale double mono, pour être tout à fait complet

mardi 16 juillet 2013

Do you often dream of flying?



"Icarus Needs" est un mini-jeu flash onirique, beau et créatif, dans lequel la progression se fait de vignettes en vignettes.
(via Ecrans.fr)

Icarus NeedsDaniel Merlin Goodbrey (2013)



Et pour répondre à la question :
"Régulièrement. Et toujours de la même manière. Pas comme un oiseau, ni un super héros (càd pas d'un vol vif, puissant, et en tout cas maîtrisé)... Mais un peu comme si je sautais en l'air, parvenais à retarder l'effet de la gravité et à ne pas retomber, puis à me mouvoir à basse altitude, le tout avec une certaine inertie."

vendredi 12 juillet 2013

Le cœur trop plein de votre image

Les références littéraires sont fréquentes chez Godard. Et les "livres dans le film", très nombreux. Dans "une femme mariée", Charlotte donne la réplique à son amant comédien, sur des textes de Bérénice, de Racine.
Plusieurs passages sont imbriqués, je reproduis l'un d'eux (déjà fort connu) :




Titius - Bérénice
- N'accablez point, Madame, un prince malheureux.
Il ne faut point ici nous attendrir tous deux.
Un trouble assez cruel m'agite et me dévore,
Sans que des pleurs si chers me déchirent encore.
[...]

- Moi-même, j'ai voulu vous entendre en ce lieu.
Je n'écoute plus rien, et pour jamais, adieu.
Pour jamais ! Ah ! Seigneur, songez-vous en vous-même
Combien ce mot cruel est affreux quand on aime ?
Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ?
Que le jour recommence et que le jour finisse
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice.

Jean-Luc Godard, Une femme Mariée (1964)
Jean Racine, Bérénice (1670)

mercredi 10 juillet 2013

Un homme que je ne suis plus

En 1997, en écoutant "Aimer", je trouvais que Miossec chantait avec justesse le désamour ("Juste après qu'il ait plu", "je plaisante") (ce qui est évidemment toujours triste à lire/entendre ou voir, cf. Blue Valentine)
Mais en 1997, Mendelson n'avait sorti qu'un album, et pas encore écrit de texte terribles comme ça.


Je ne sais pourquoi je te supportais mieux
Les jours où je te mentais
Les mensonges sont des sortes de souhaits
Les mensonges ça tient comme les bouées
Les mensonges c'est bien tout ce qui nous tenait

Ces photographies de nous dans la chambre
Comme ces photos de perdants
Qui rient et chantent encore
La veille de leur défaite
Ces souvenirs de nous où tu souris à un autre que moi
Un homme que je ne suis plus
Un homme qui n'est plus là
Un homme qui a perdu et qui te déteste

Je ne sais plus quand je me suis réveillé
Et plus rien n'avait d’intérêt
J’imagine que je croyais t'aimer
Oui je t'aimais, je t’aimais quand même
Et je rêvais de couteaux
Je rêvais doucement que je nous tuais
Il y eut comme ça de beaux moments bien tranquilles
Où je nous voyais morts
Et tu me souriais

Eh ben tu le vois que je pense encore à toi
Je pense à toi quand même
Et une odeur morte monte et s'élève
Des feuilles mortes du bois

Tu le vois que je pense encore à toi
Je pense encore à toi quand même
Nous aurions pu habiter
Cent ans encore ici mon amour
Comme c'est calme
Et même si j’avais été fatigué pour toujours
Nous aurions pu vivre et mourir ensemble
Encore cent ans ici mon amour

Mendelson, d'un coup
s/t (Ici d'ailleurs, 2013)

lundi 8 juillet 2013

Getting Closer [Crossed Covers]

On commence par la jolie pochette de l'album de Blue Hawaii sorti en février dernier... 
 
suivie, sur un concept similaire, par Placebo (pour un résultat assez moche, avouons-le). Close conclut la série, quoiqu'en réalité, les visuels liés à ce projet complèteraient bien mieux l'épisode de Crossed Covers intitulé Let's Make Love.

Blue hawaii, Untogether (Arbutus, 2013)
Placebo, Sleeping with Ghosts (2003)
Close, Getting Closer (!K7, 2013)

samedi 6 juillet 2013

L'ombre des choses réelles


Chronicle, Josh Trank (2012)

Je continue d'utiliser Chronicle pour vous rendre compte de ma lecture de Schopenhauer. Discourant sur Kant, il en vient en effet à évoquer Platon, qui aura eu l'intuition de ce que le philosophe allemand devait plus tard démontrer. Dans la République (au septième livre me dit-on), Platon exprime cette vision par un mythe, auquel on fait souvent référence en tant qu'allégorie de la caverne.

Pour ce qu'il faut retenir, et donc avec les mots de Schopenhauer :

Les hommes, enchaînés dans une caverne obscure, ne voient ni la vraie lumière originelle ni les choses réelles, mais seulement la faible lumière du feu qui brûle dans la caverne et les ombres des choses réelles que projette ce même feu placé dans leur dos. Ils pensent pourtant que les ombres sont la réalité et la détermination de la succession de ces ombres, la vraie sagesse.

(j'ai fait court)

Arthur Schopenhauer, Critique de la Philosophie Kantienne (1819)
cf. aussi Le Monde comme Volonté et Représentation (Livre III, §31)

lundi 1 juillet 2013

I cried to dream again

CALIBAN.- N'aie pas peur : l'île est remplie de bruits, de sons et de doux airs qui donnent du plaisir sans jamais faire de mal. Quelquefois des milliers d'instruments tintent confusément autour de mes oreilles ; quelquefois ce sont des voix telles que, si je m'éveillais alors après un long sommeil, elles me feraient dormir encore ; et quelquefois en rêvant, il m'a semblé voir les nuées s'ouvrir et me montrer des richesses prêtes à pleuvoir sur moi ; en sorte que lorsque je m'éveillais, je pleurais d'envie de rêver encore.

William Shakespeare, la Tempête (1611)

Stephano, Trinculo, Caliban et Ariel


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*     *
En VO :

CALIBAN
Be not afeard; the isle is full of noises,
Sounds and sweet airs, that give delight and hurt not.
Sometimes a thousand twangling instruments
Will hum about mine ears, and sometime voices
That, if I then had waked after long sleep,
Will make me sleep again: and then, in dreaming,
The clouds methought would open and show riches
Ready to drop upon me that, when I waked,
I cried to dream again.