vendredi 30 mars 2012

二十四時間の情事


- Qu'est-ce que c'était pour toi, Hiroshima, en France?
- La fin de la guerre... je veux dire complètement. La stupeur à l'idée qu'on ait osé. La stupeur à l'idée qu'on ait réussi. Et puis aussi pour nous le commencement d'une peur inconnue. Et puis l'indifférence. La peur de l'indifférence aussi.


Hiroshima mon Amour, Alain Resnais (1959)

mardi 27 mars 2012

La dure réality

Ca l'air bien...

Attention, là, il y a concept : Hollywood Girls, ce sont d’anciens candidats de télé-réalité qui jouent la comédie. NRJ 12 poursuit ainsi sa très écologique entreprise de recyclage des déchets de Secret Story,Dilemme et autre Loft Story. Il y a les Anges de la télé-réalité (trois saisons déjà en attendant l’imminente quatrième à Hawaï), où la chaîne emmène nos sauvages aux Amériques afin de les transformer en mannequin pour catalogue de VPC californien, chanteur pour ascenseur californien ou doublure lumière pour production audiovisuelle de DVD californien. Là, avecHollywood Girls, NRJ 12 affine un peu plus encore son business model : les candidats de télé-réalité jouent le rôle d’apprentis mannequin, chanteur et ascenseur californiens. Vertige.

[...]

La dramality, donc. Avantage du néologisme : en même temps qu’il explique ce qu’est ce mélange de télé-réalité et de soap, il nous renseigne sur le caractère dramatique de la chose, mais regardez plutôt le générique. [...] N’était notre science de la télé-réalité, on n’aurait reconnu personne. Ni Ayem (Secret Story 5) qui joue Ayem. Ni Caroline (Secret Story 2) qui joue Caroline. Ni Kevin (Dilemme) qui joue Kevin. Ni Kamel (Loft Story 2) qui joue Kamel. Mesurez un peu la mise en abyme et sa subtilité : Kamel a beau jouer Kamel, son personnage de Kamel n’est pas le Kamel rendu célèbre par sa prononciation de thym en « tim » dans le Loft mais un Kamel qui travaille dans un café de LA.

L’intrigue ? Ayem et Caroline débarquent à Los Angeles. Voilà. A ce stade, ça pourrait être un Rohmer mais Hollywood Girls, descendant d’une lignée cinématographique partant de Voisins, voisines jusqu’à Sous le soleil en passant par Hélène et les garçons et Classe mannequin, c’est plus que ça. Ayem et Caroline veulent percer à LA et elles ont chacune un secret : Caro est enceinte et Ayem cherche son demi-frère Josh qui n’est autre que le fils du cinéaste Barry Stevens (oui, le fameux), lequel a pour directrice de casting une certaine Geny G. qui n’est autre que l’agent de Sandra qui n’est autre que la coloc d’Ayem et Caro ainsi que la sœur de Nicolas qui ne s’avérera être autre que le petit ami d’Ayem qui n’est autre (on parle de Nicolas) que le pote de Kevin. Kamel ? Il n’est autre que l’ami de tous les autres.

La suite, ici:

Isabelle Roberts, Raphaël Garrigos
dans Libération du 24/03/2012

dimanche 25 mars 2012

Le messager parle

Le messager est parfois un âne inspiré qui va son propre chemin. Jusqu'à vous. Il ne s'alourdit de rien qui l'humilie ou l'exténue. Le message est parfois un âne démiurge. Il vient vers vous qui êtes innocents. Il s'installe au coeur de votre village. Il se désaltère à la fontaine. Un oeil amical et un oeil joueur scrutent vos attentions.
Le temps passe. Seul le temps passe. Comme toujours. Comme depuis la naissance de la vie sur terre. Tout devrait tôt ou tard passer. Rien jamais ne passe. Sauf le temps.
Certes le pire de tous côtés nous assaille, nous dévaste. Les civilisations, une à une, disparaissent. Les personnes civilisées sont avilies ou sont tuées. La sauvagerie prolifère. Les personnes cruelles prospèrent.
Mais attendez, patientez.
Car voici que nous sommes capables de donner des nouvelles. Voici que vous êtes capables de lire ces nouvelles.
Le messager parle.
Le journal paraît.
Ce journal, nous lui avons donné le nom du temps qui vient: l'Impossible.

Notre journal, par Michel Butel.
Préface du n°1 du mensuel L'impossible.
On y lit encore :

Les personnes qui n'imaginent pas les devoirs
des Etats et de leurs dirigeants
les personnes qui ne pensent pas aux droits des animaux
des enfants et des femmes
les personnes qui nient les droits des glaciers
des arbres et des océans
les personnes qui ne pleurent pas la disparition
des Etrusques, des Khazars, des Comanches
les personnes qui n'aiment pas les anarchistes
les personnes qui n'aiment pas les lesbiennes
les homos, les transexuels
les personnes qui détestent les idiots
ou qui détestent les pauvres
les personnes qui n'aiment pas les faibles
qui n'aiment pas la lenteur
les personnes qui n'aiment pas le silence
les personnes qui ne comprennent pas
ce que c'est, la banalité du mal
elles ont un adversaire déclaré, mais quel adversaire,
de si ardente jeunesse :
L'impossible

Michel Butel, La jeunesse ou la mort.

Je n'en suis qu'à la page 20 sur 128, et déjà j'ai envie de vous rapporter une dizaine de passages. Plus d'infos sur ce mensuel, via l'interview de son fondateur à lire sur écrans.fr. Il devrait à coup sûr vous donner envie de vous précipiter l'acquérir

samedi 24 mars 2012

We are the only winners

For guys like me, Las Vegas washes away your sins. It's a morality car wash. It does for us what Lourdes does for humpbacks and cripples. And, along with making us legit, comes cash. Tons of it. I mean, what do you think we're doing out here in the middle of the desert? It's all this money. This is the end result of all the bright lights and the comped trips, of all the champagne and free hotel suites, and all the broads and all the booze. It's all been arranged just for us to get your money. That's the truth about Las Vegas. We're the only winners. The players don't stand a chance.


Martin Scorcese, Casino (1995)

mercredi 21 mars 2012

Le pire de tout, c'est de sentir son âme mourir

Toujours prendre garde à ce que les condtions d'observation ne modifient pas l'expérience. Même en ethnologie.

Dernier extrait de La Vie Mode d'Emploi de Perec.

Le matin du quatrième jour, quand Appenzzell se réveilla, le village avait été abandonné. Les cases étaient vides. Toute la population du village, les hommes, les femmes, les enfants, les chiens, et même les vieillards qui d’ordinaire de bougeaient pas de leurs nattes, était partie, emportant leurs maigres provisions d’ignames, leurs trois chèvres, leurs sinuya et leurs pekee.

Appenzzell mit plus de deux mois à les retrouver. Cette fois-ci leurs cases avaient été hâtivement construites au bord d’un marigot infesté de moustiques. Pas plus que la première fois, les Kubus ne lui parlèrent ni ne répondirent à ses avances ; un jour, voyant deux hommes qui essayaient de soulever un gros tronc d’arbre que la foudre avait abattu, il s’approcha pour leur prêter main forte ; mais à peine eut-il posé la main sur l’arbre que les deux hommes le laissèrent retomber et s’éloignèrent. Le lendemain matin, à nouveau, le village était abandonné.

Pendant près de cinq ans, Appenzzell s’obstina à les poursuivre. A peine avait-il réussi à retrouver leurs traces qu’ils s’enfuyaient à nouveau, s’enfonçant dans des régions de plus en plus inhabitables pour reconstruire des villages de plus en plus précaires. Pendant longtemps Appenzzell s’interrogea sur la fonction de ces comportements migratoires. Les Kubus n’étaient pas nomades et ne pratiquaient pas de cultures sur brûlis, ils n’avaient aucune raison de se déplacer si souvent ; ce n’était pas davantage pour des questions de chasse ou de cueillette. S’agissait-il d’un rite religieux, d’une épreuve d’initiation, d’un comportement magique lié à la naissance ou à la mort ? Rien ne permettait d’affirmer quoi que ce soit de ce genre ; les rites kubus, s’ils existaient, étaient d’une discrétion impénétrable et rien, apparemment, ne reliait entre eux ces départs qui, à chaque fois, semblaient pour Appenzzell tout à fait imprévisibles.

La vérité cependant, l’évidente et cruelle vérité, se fit enfin jour. Elle se trouve admirablement résumée dans la fin de la lettre qu’ Appenzzell envoya de Rangoon à sa mère environ cinq mois après son départ :

“ Quelque irritants que soient les déboires auxquels s’expose celui qui se voue corps et âme à la profession d’ethnographe afin de prendre par ce moyen une vue concrète de la nature profonde de l’Homme – soit, en d’autres termes, une vue du minimum social qui définit la condition humaine à travers ce que les cultures diverses peuvent présenter d’hétéroclite – et bien qu’il ne puisse aspirer à rien de plus que mettre au jour des vérités relatives (l’atteinte d’une vérité dernière étant un espoir illusoire), la pire des difficultés que j’ai dû affronter n’était pas du tout de cet ordre : j’avais voulu aller jusqu’à l’extrême pointe de la sauvagerie ; n’étais-je pas comblé, chez ces gracieux Indigènes que nul n’avait vus avant moi, que personne, peut-être, ne verrait plus après ? Au terme d’une exaltante recherche, je tenais mes sauvages, et je ne demandais qu’à être l’un d’eux, à partager leurs jours, leurs peines, leurs rites ! Hélas, eux ne voulaient pas de moi, eux n’étaient pas prêts du tout à m’enseigner leurs coutumes et leurs croyances ! Ils n’avaient que faire des présents que je déposais à côté d’eux, que faire de l’aide que je croyais pouvoir leur apporter ! C’était à cause de moi qu’ils abandonnaient leurs villages et c’était seulement pour me décourager moi, pour me persuader qu’il était inutile que je m’acharne, qu’ils choisissaient des terrains chaque fois plus hostiles, s’imposant des conditions de vie de plus en plus terribles pour bien me montrer qu’ils préféraient affronter les tigres et les volcans, les marécages, les brouillards suffocants, les éléphants, les araignées mortelles, plutôt que les hommes ! Je crois connaître assez la souffrance physique. Mais c’est le pire de tout, de sentir son âme mourir… ”

Georges Perec, La vie mode d'emploi (1978)

mardi 20 mars 2012

L'esclavage, c'est la liberté


- The methamphetamine we make is much superior to the so-called biker crank you know of. [...] The narcotic effect is far more potent. This product is the drug of the future. [...] It's stronger, more addictive than cocaine, which means it will move in higher volume.

Conversations entre hommes d'affaires, dans la série Breaking Bad.
Effectivement, une drogue plus addictive aura de meilleures retombées économiques. Simple logique. Un raisonnement aussi froid pourrait sembler réservé aux pires esprits criminels, sans foi ni loi.

Après tout, même Don Corleone dans Le Parrain refuse de toucher à ce qu'il qualifie de "dirty business".

(c'est aussi parce qu'il pense qu'il pourrait alors perdre ses appuis politiques, soyons complets). Parmi les autres familles mafieuses, on trouve également quelques traces de scrupules, face à cette activité alors naissante.

Don Zaluchi: I don't want it near schools! I don't want it sold to children! That's an infamia. In my city, we would keep the traffic in the dark people, the coloreds. They're animals anyway, so let them lose their souls.


Pourquoi cette introduction? Pour établir un parallèle avec un article récemment lu sur lemonde.fr, relatant la parution d'un ouvrage intitulé "Golden Holocaust".

D'autres manoeuvres sont plus anciennes. Le plan Marshall, par exemple. Le grand programme d'aide à la reconstruction de l'Europe dévastée par la seconde guerre mondiale a également été "mis à profit par les cigarettiers américains pour rendre les populations européennes accros au tabac blond flue-cured, facilement inhalable". Tout est là. Le flue-curing est une technique de séchage des feuilles de tabac qui se répand largement aux Etats-Unis à la fin du XIXe siècle, et qui permet de rendre la fumée moins irritante, donc plus profondément inhalable. Or jusque dans la première moitié du XXe siècle, on fume encore, dans une bonne part de l'Europe continentale, du tabac brun, très âcre, beaucoup moins dangereux et addictif. Car plus la fumée peut pénétrer profondément dans les poumons, plus l'afflux de nicotine dans l'organisme est rapide, plus l'addiction qui se développe est forte. Et plus les dégâts occasionnés sur les tissus pulmonaires sont importants. "Au cours de la réunion de Paris (le 12 juillet 1947) qui a mis en mouvement le plan Marshall, il n'y avait aucune demande des Européens spécifique au tabac, raconte Robert Proctor. Cela a été proposé et mis en avant par un sénateur de Virginie. Au total, pour deux dollars de nourriture, un dollar de tabac a été acheminé en Europe."

L'article est assez saisissant, par le nombre de manoeuvres qu'il énonce. Source principale du livre sus cité: les "tobacco documents", somme considérable de documents émanant de géants du tabac, rendus publiques au début des années 90 par une décision de justice.

Outre ces révélations, j'ai trouvé particulièrement bien vu le rapprochement avec le novlangue d'Orwell, pour dénonce l'imposture du message associant cigarette et liberté. Au-delà de l'image, celle du cowboy marlboro par exemple, il est vrai qu'on entend souvent les fumeurs dire d'un ton agacé qu'il s'agit là de la dernière liberté (de choix, d'action).

"Comment peut-on parler de liberté lorsque 90 % des fumeurs interrogés disent vouloir s'arrêter sans y parvenir ?" Le novlangue d'Orwell n'est pas loin. "La guerre, c'est la paix", "l'amour, c'est la haine" professait le Parti omnipotent de 1984. Dans le monde du tabac, "l'esclavage, c'est la liberté".

Et ce message fait mouche. Les adolescents voient souvent dans la cigarette une manifestation d'esprit rebelle. Convaincre qu'inféoder ses fonctions biologiques à de grands groupes industriels tient de la rébellion, voilà un tour de force marketing, dont le projet est inscrit en toutes lettres dans les "tobacco documents" : il faut vendre aux jeunes l'idée que fumer procède d'une "rébellion acceptable".

Breaking Bad, Hermanos (S04E01)
Francis Ford Coppola, Le Parrain (1972)
Robert Proctor, Golden holocaust (2012)

lundi 19 mars 2012

Question de Goo

Alors que j'étais en quête d'informations sur le groupe Klaus&Kinski (que j'évoque un peu plus bas dans un article de la série "il ne faut pas confondre"), je suis tombé sur ce visuel

référence évidente à la pochette de Goo

elle-même reprenant une photo de presse (pour les détails, reportez la 3ème partie de ma saga Sonic Youth)

C'était donc l'occasion rêvée pour consigner ici la pochette de la compilation de raretés des écossais de Twilight Sad parue chez Fat Cat en 2008

dimanche 18 mars 2012

Reign Of Terror

Les jours filent, et je n'ai toujours pas fait état ici du dernier volume de Top Tape !
Du coup, la prochaine émission, c'est déjà ce soir (19h).

Retour à Top Tape Vol.6 (S4) : une mixtape à base d'indie rock et d'electro pop, feat. Islands, Parenthetical Girls, Xiu Xiu, Sleigh Bells, Grimes, Blonde Redhead, Phantogram, Glass Candy, Bear in Heaven, Phèdre et Cloud Nothings (dont 5 albums étaient à gagner)

Playlist complète + émission sur le site de Radio Campus Paris,
[ Accès Rapide _]

Sinon, ce soir, l'émission prendra le large et parcourra le sud des Etats-unis, de Modesto (Grandaddy) à Tucson, avec une étape prolongée à Albuquerque, afin d'évoquer en musique la série Breaking Bad.

A tout à l'heure !


jeudi 15 mars 2012

Il ne faut pas confondre...

Je continue de réfléchir à la pertinence de la rubrique "Il ne faut pas confondre..." sur ce blog.
En attendant que je prenne ma décision, mieux vaudrait que vous ne confondîtes pas :

jonwayne (le producteur/rapper de L.A. qui monte)

Com Truise (l'un des alias du producteur electro Seth Haley) sur Ghostly

les sympathiques espagnols de Klaus & Kinski et leur synth pop

et Xina Xurner (au sujet desquels il est pas facile de trouver des infos)

[ici une photo du groupe]

Edit : J'ajoute encore Robert & Mitchum, dont je viens de recevoir l'album (paru sur le label bordelais Virage Tracks)

J'ajoute encore Chet Faker (From Australia)

mardi 13 mars 2012

il faut se débarrasser du ressentiment

Si on veut comprendre quelque chose, pas grand-chose, au monde, il faut se débarrasser du ressentiment. Le ressentiment, j'en ai encore un peu à l'égard de la société mais de moins en moins et j'espère que dans quelques temps je n'en aurai plus du tout. [...] Il y a dix ou quinze ans j'étais contre vous. Maintenant, je ne suis ni pour vous, ni contre vous, je suis en même temps que vous et mon problème n'est plus de m'opposer à vous mais de faire quelque chose où nous soyons pris ensemble, vous comme moi.

Jean Genet, "Entretien avec Madeleine Gobeil", L'ennemi déclaré, texte et entretiens
(1991)

lu dans le livret de la pièce Déjà Là.

mercredi 7 mars 2012

Movie Poster(s) of the Week

A défaut de pouvoir vous restituer certains très beaux plans des films de King Hu, voici - dans des styles très différents - de chouettes affiches correspondant aux deux films que j'ai pu voir.

"Raining in the Moutain" (1979), tout d'abord :


Et surtout a Touch of Zen (trois heures tout de même, mais la dernière est mémorable)


King Hu, donc, l'homme sans qui Tigre et Dragon, ou encore Kill Bill ne seraient pas arrivés...

lundi 5 mars 2012

Read my lips


Quand je vois le visage de l'actrice Xu Feng (à la faveur de la rétrospective King Hu le mois dernier à la Cinémathèque), je comprends qu'on puisse faire une fixation sur une bouche, voire sur une lèvre, comme Tolstoï avec l'un de ses personnages dans "La Guerre et la Paix".


La jeune princesse Bolkonsky avait apporté son ouvrage dans un sac de velours brodé d’or. Sa lèvre supérieure, une ravissante petite lèvre, ombragée d’un fin duvet, ne parvenait jamais à rejoindre la lèvre inférieure ; mais, malgré l’effort visible qu’elle faisait pour s’abaisser ou se relever, elle n’en était que plus gracieuse, malgré ce léger défaut tout personnel et original, privilège des femmes véritablement attrayantes, car cette bouche à demi ouverte lui prêtait un charme de plus. Chacun admirait cette jeune femme, pleine de vie et de santé, qui, à la veille d’être mère, portait si légèrement son fardeau.

La guerre et la Paix, Léon Tolstoï (1865-1869)


Désolé pour la faible qualité des images, il n'y a, à mon grand désespoir, que peu d'images sur internet de ce fabuleux film...

samedi 3 mars 2012

Nous sommes la destination

Arnaud Michniak dans le texte...
(maintenant que j'ai évoqué la pièce qu'il a écrite dans l'article précédent)

L’énergie qui se dégage de nos rencontres agit. Elle est une énergie et n’a pas besoin de trouver une volonté d’agir, elle est déjà volonté et action.
Nous ne cherchons pas à générer du contenu, nous générons tout court.
Nous ne produisons pas de contenu, nous sommes le contenu.
Nous sommes un contenu qui se génère.

Nous ne questionnons pas la place de l’action, nous sommes la place et l’action et c’est ça qui questionne.
Ce qui émerge est déjà là, l’émergence est le mode normal inévitable, ce qui arrive, et toujours quelque chose arrive...
Que faisons-nous ? Nous arrivons.

Nous connaissons la destination.
Nous savons que nous allons y être nous-mêmes que nous le voulions ou non. Et nous ne savons pas, malgré ce que nous pensons, faire autre chose que ce que nous sommes.
Nous sommes la destination.

Arnaud Michniak, Déjà Là (2011)


jeudi 1 mars 2012

On a grandi entre deux époques

Parmi les groupes et artistes que j'affectionne tout particulièrement (cf. Hit Parade), il y en a dont je ré-écoute régulièrement la discographie complète. Mendelson, Programme / Arnaud Michniak et Godspeed You Black Emperor.

Aussi, voir les deux derniers d'un certaine façon réunis dans la pièce déjà là au théâtre de la colline (sur laquelle je reviendrai), aura déclenché une nouvelle écoute de leur oeuvre.
Il semble d'ailleurs que Pascal Bouaziz aka Mendelson n'était pas loin, puisque la veille à Petit Bain, sur scène avec Michel Cloup.... (ils ont d'ailleurs repris "Seule la musique" de Jean-Louis Costes, et je comprends désormais pourquoi un petit nombre de personnes en cherchaient les paroles récemment, effectivement déjà publiées dans ces colonnes)

On a grandi entre deux époques,
tout a changé très vite
Ce qui nous guidait hier n’a plus vraiment cours aujourd’hui.
On a suivi comme on suivrait un film :
sans y prendre part.
L’ambition nous a lâchés
comme la politique avant nous avait trompés
comme le terrain de jeu nous avait lassés.

Programme, Cette page d'histoire
L'enfer tiède (Lithium, 2002)

Ce texte est repris dans le livret de présentation de la pièce, qui constituera d'ailleurs le fil rouge des prochains jours.
Mais avant celà, le morceau de Programme ne s'arrête pas là :

[...]

On n’a jamais travaillé,
jamais vraiment comme nos parents :
juste quelques plans à droite, à gauche pour arrondir les fins de mois
ou compléter les minimums qu’offre l’état
pour qu’on n’aille pas mettre le nez dans ses affaires
ou faire n’importe quoi.

[...]

On n’aura pas de descendance,
on n’ira jamais promener nos familles le dimanche,
on ne s’amusera pas des bêtises des petits.
Il y a eu un choix à faire a priori, et ceux qui ont refusé de le faire n’ont rien.
Rien que des mauvaises raisons pour continuer à jouir de leurs propres frustrations
La cohérence, c’est trébucher en pleine rue et subir le rire des autres
ce n’est pas la routine dont on parle partout

On a couvé entre deux époques
les névroses de la fin de la première, et celles du commencement de l’autre.
On n’a pas eu besoin de connaître la guerre pour être perdu,
on l’a vue à la télé.
Et on s'est senti coupable de ne rien faire
avant d’être capable d’y penser.
Et on n’a eu besoin de rien faire
pour écrire cette page d’histoire.


* * *

Pour les fans de feu le label Lithium, sachez que Bertrand Betsch est en concert ce dimanche au Ciné 13 à Paris.
(places à gagner avec Radio Campus Paris ; 13,50 € sinon)