mardi 31 août 2010

Très souvent on devrait se taire

Elle : Vous venez souvent ici ?

Lui : Non, quelques fois. Aujourd’hui, c’est par hasard.

Elle : Pourquoi vous lisez ?

Lui : C’est mon métier.

Elle : C’est drôle, tout à coup je ne sais pas quoi dire. Ca m’arrive très souvent. Je sais ce que je veux dire, je réfléchis avant de le dire pour savoir si c’est bien ça qu’il faut dire. Mais au moment de le dire… puff je ne suis plus capable de le dire.

Lui : Oui évidemment. Ecoutez, vous avez lu "les trois mousquetaires"?

Elle : Non, mais j’ai vu le film, pourquoi ?

Lui : Parce que. Vous voyez il y a là-bas Porthos, d’ailleurs c’est pas dans "les trois mousquetaires", c’est dans "vingt ans après". Porthos le grand, le fort, un peu bête, il n’a jamais pensé de sa vie, vous comprenez. Alors une fois il faut qu’il mette une bombe dans un souterrain pour la faire éclater, il le fait, il place sa bombe, il allume la mèche et puis il se sauve naturellement. Et en courant tout à coup il se met à penser. Il pense à quoi? Il se demande comment il est possible qu’il puisse mettre un pied devant l’autre, ça vous est arrivé aussi sans doute. Alors il s’arrête de courir, de marcher, il peut plus, il peut plus avancer. Tout explose, le souterrain lui tombe dessus, il le retient avec ses épaules, il est assez fort, mais finalement au bout d’un jour, deux jours je sais pas, il est écrasé, il meurt.
En somme la première fois qu’il a pensé, il en est mort.

Elle : Pourquoi vous me racontez des histoires comme ça ?

Lui : Comme ça, un peu pour parler.

Elle : Mais pourquoi est-ce qu’il faut toujours parler ? Moi je trouve que très souvent on devrait se taire. Vivre en silence. Plus on parle, plus les mots ne veulent rien dire.

(...)

Vivre sa Vie, Jean-Luc Godard (1962)
Le film du week-end...
(à suivre)


Cette scène constitue le onzième "tableau" du film

PLACE DU CHÂTELET - L'INCONNU - NANA FAIT
DE LA PHILOSOPHIE SANS LE SAVOIR

dimanche 29 août 2010

Streamside Day

L'une des oeuvres que j'aurai durablement retenue, dans l'exposition Dreamlands qui s'est terminée le 9 août au Centre Pompidou, aura été cette court métrage de Pierre Huyghe : "Streamside Day".

J'en retrouve aujourd'hui, par hasard, des images sur internet.



Se dégageait de ce film une étrange atmosphère, quasi lynchienne. Je renoue avec la vidéo du dimanche, en vous proposant un aperçu, via la première moitié du court-métrage, seule trace que j'ai réussi à trouver sur internet.
Ce sera donc très incomplet, d'autant que les images "qui restent" figurent plus dans la deuxième moitié.



Quelques autres images...


Si je ne devais mettre en lumière qu'un aspect visuel de la comparaison avec lynch, ce serait ces déguisements d'homme à tête d'animaux.


Ce qui est d'ailleurs un trait commun avec (feu) Mark Linkous / Sparklehorse (outre le projet Dark Night of the Soul), tel qu'il apparaissait parfois sur ses photos (inquiétantes) promos.





Aux dernieres nouvelles, l'homme à la tête de cheval a été aperçu dans les rues d'Aberdeen, Ecosse (cf. Google maps, en mode Street View. Les vues les plus nettes ont été effacées, mais on le distingue sur le lien que je vous ai mis. Avant que Google n'intervienne, ça donnait ça:)



Pierre Huyghe, Streamside Day (2003)
David Lynch, Inland Empire (2006)

samedi 28 août 2010

the ideal crash



Mt Kimbie, Crooks & Lovers (Hotflush, 2010)
dEUS, the Ideal Crash (Island, 1999)

Nuancier :


L'oxymore "Ideal Crash" me rappelle un peu cette photo multibloggée, surnommée "the most beautiful suicide".



A l'origine, elle est parue dans Life, en 1947.

"On May Day, just after leaving her fiancé, 23-year-old Evelyn McHale wrote a note. 'He is much better off without me ... I wouldn't make a good wife for anybody,' ... Then she crossed it out. She went to the observation platform of the Empire State Building. Through the mist she gazed at the street, 86 floors below. Then she jumped. In her desperate determination she leaped clear of the setbacks and hit a United Nations limousine parked at the curb."

mercredi 25 août 2010

35 mètres carrés (Etre ou Avoir, part.2)

Je vous propose un nouvel extrait des Choses de Perec.
Il y est ici question de l'appartement de Jérôme et Sylvie (éternels insatisfaits).

Big up à tous les parisiens habitant un 35m²...

Ce passage reflète le style énumératif et détaillé qu'adopte Perec dans le roman. Il le faut bien: la situation, les pensées et aspirations des protagonistes du roman se traduisent en termes d'objets matériels.

Ils vivaient dans un appartement minuscule et charmant, au plafond bas, qui donnait sur un jardin. Et se souvenant de leur chambre de bonne - un couloir sombre et étroit, surchauffé, aux odeurs tenaces - ils y vécurent d'abord dans une sorte d'ivresse, renouvelée chaque matin par le pépiement des oiseaux. Ils ouvraient les fenêtres, et, pendant de longues minutes, parfaitement heureux, ils regardaient leur cour. La maison était vieille, non point croulante encore, mais vétuste, lézardée. Les couloirs et les escaliers étaient étroits et sales, suintant d'humidité, imprégnés de fumées graisseuses. Mais entre deux grands arbres et cinq jardinets minuscules, de formes irrégulières, pour la plupart à l'abandon, mais riches de gazon rare, de fleurs en pots, de buissons, de statues naïves même, circulait une allée de gros pavés irréguliers, qui donnait au tout un air de campagne. C'était l'un de ces rares endroits à Paris où il pouvait arriver, certains jours d'automne, après la pluie, que montât du sol une odeur, presque puissante, de forêt, d'humus, de feuilles pourrissantes.
Jamais ces charmes ne les lassèrent et ils y demeurèrent toujours aussi spontanément sensibles qu'aux premiers jours, mais il devint évident, après quelques mois d'une trop insouciante allégresse, qu'ils ne sauraient suffire à leur faire oublier les défauts de leur demeure. Habitués à vivre dans des chambres insalubres où ils ne faisaient que dormir, et à passer leurs journées dans des cafés, il leur fallut longtemps avant de s'apercevoir que les fonctions les plus banales de la vie de tous les jours - dormir, manger, lire, bavarder, se laver - exigeaient chacune un espace spécifique, dont l'absence notoire commença dès lors à se faire sentir. Ils se consolèrent de leur mieux, se félicitant de l'excellence du quartier, de la proximité de la rue Mouffetard et du Jardin des Plantes, du calme de la rue, du cachet de leurs plafonds bas, et de la splendeur des arbres et de la cour tout au long des saisons; mais, à l'intérieur, tout commençait à crouler sous l'amoncellement des objets, des meubles, des livres, des assiettes, des paperasses, des bouteilles vides. Une guerre d'usure commençait dont ils ne sortiraient jamais vainqueurs.
[...] Certains jours l'absence d'espace devenait tyrannique. Ils étouffaient. Mais ils avaient beau reculer les limites de leurs deux pièces, abattre des murs, susciter des couloirs, des placards, des dégagements, imaginer des penderies modèles, annexer en rêve les appartements voisins, ils finissaient toujours par se retrouver dans ce qui était leur lot, leur seul lot: trente-cinq mètres carrés


George Perec, Les choses (1965)

dimanche 22 août 2010

Etre ou Avoir, part.1

"Les choses" est le premier roman de Georges Perec. Par certains aspects (austérité de la narration, thématiques), il préfigure "Un Homme qui Dort", livre que j'ai longuement loué dans ces colonnes.

Dans une France qui ne connaît pas la crise (puisqu'en pleines Trentes Glorieuses), ce livre voit Jérôme et Sylvie, un jeune couple, tenter de trouver sa place dans la société de consommation de l'époque.

Si certaines données contextuelles nécessitent d'être "transposées", les problématiques abordées restent pleinement contemporaines.

Si l'on admet aisément de la part d'individus qui n'ont pas encore atteint la trentaine, qu'ils conservent une certaine indépendance et travaillent à leur guise, si même on apprécie parfois leur disponibilité, leur ouverture d'esprit, la variété de leur expérience, ou ce que l'on appelle encore leur polyvalence, on exige en revanche, assez contradictoirement d'ailleurs de tout futur collaborateur, qu'une fois passé le cap des trente ans (faisant ainsi, justement, des trente ans un cap), il fasse preuve d'une stabilité certaine, et que soient garantis sa ponctualité, son sens du sérieux, sa discipline. Les employeurs, particulièrement dans la publicité, ne se refusent pas seulement à embaucher des individus ayant dépassé trente-cinq ans, ils hésitent à faire confiance à quelqu'un qui, à trente ans, n'a jamais été attaché. Quant à continuer, comme si de rien n'était, à ne les utiliser qu'épisodiquement, cela même est impossible: l'instabilité ne fait pas sérieux; à trente ans, l'on se doit d'être arrivé, ou bien l'on est rien. Et nul n'est arrivé s'il n'a trouvé sa place, s'il n'a creusé son trou, s'il n'a ses clés, son bureau, sa petite plaque.

Jérôme et Sylvie pensaient souvent à ce problème. Ils avaient encore quelques années devant eux, mais la vie qu'ils menaient, la paix, toute relative, qu'ils connaissaient, ne seraient jamais acquises. Tout irait en s'effritant; il ne leur resterait rien. Ils ne se sentaient pas écrasés par leur travail, leur vie était assurée, vaille que vaille, bon an mal an, tant bien que mal, sans qu'un métier l'épuise à lui seul. Mais cela ne devait pas durer

George Perec, Les choses (1965)

mardi 17 août 2010

F#A#∞

Chez moi, dans l'action d'acheter une place de concert, il y a deux freins:
Le premier, c'est le prix, disons, s'il dépasse 14 euros. Heureusement, cette question ne se pose pas souvent à moi.
Le second, c'est le délai qui me sépare du concert... Au delà d'un mois, cela me paraît trop engageant.

Aucun de ces freins n'a joué, lorsque j'ai déboursé 29 euros la semaine passée, en vue du 14 janvier 20102011.
Car, enfin, je vous l'annonçais , Godspeed s'apprêtait à tourner début 2011, et bien, c'est désormais avéré, ils passent par la France, par Paris (uniquement).



Il reste des places (au moment ou j'écris ces lignes, heureusement qu'elles ont été mises en ligne pendant les vacances), ca se passe du côté de Digitick...

Et sans vouloir me répéter, il faut venir, pour le concert de l'année, voire de la décennie, quand même, ca vaut le coup.



Godspeed you! black emperor
brainwashed.com/godspeed

La première image est extraite du film
Goddo supiido yuu! Burakku emparaa (Mitsuo Yanagimachi, 1976)

lundi 16 août 2010

Le sens des valeurs

Le moment lol du jour aura été ma visite à la boutique de jeux de société bien connue de la rue des écoles, Descartes.

Vendeur très sympathique, qui connaît bien son affaire, et chacun des jeux qu'il propose. Ainsi, m'orientant vers un jeu de cartes, il a commencé à m'expliquer les règles. Je crois que j'ai suivi pendant à peu près une phrase et demi, avant de décrocher... Les explications ont bien duré deux minutes, lors desquelles - grave erreur - je me suis mis à penser à Kaamelott.
Tout l'enjeu a donc consisté à ne pas éclater de rire.

Car dans Kaamelott, il est question du "Cul de Chouette", de la "Grelotine", du "Sirop", et du "Sloubi". Et les auteurs ont très bien senti ce qu'il pouvait y avoir d'abscon dans une règle de jeu de société, expliqué par un "expert" à un profane.



Je laisse la parole à Perceval (ici à droite) :

- Le principe, c'est de faire des valeurs. Donc là mettons on est trois, y a trois valeurs à distribuer. C'est hyper facile. On va dire sirop de 8, sirop de 14, sirop de 21.
- Oui, mais alors... qu'est-ce que vous entendez exactement par sirop ?
- Non mais, vous occupez pas des sirops tout de suite, c'qu'il faut comprendre d'abord, c'est les valeurs. Si vous lancez une valeur en début de tour, mettons un sirop de 8, pour commencer petit, les autres ont le choix entre laisser filer la mise, ou relancer un sirop de 14.
- Mais dans quel sens on tourne ?
- Dans le sens des valeurs ! C'est pour ça qu'il faut bien comprendre le système des valeurs, après, ça va tout seul.
- Oui... mais je crois qu'il faudrait quand même faire un tour pour rien, parce que là j'arrive pas bien a me représenter.
- Bon, alors mettons que j'ouvre avec un sirop de 8. Si c'est vous qui avez siroté au tour d'avant, ça tourne dans l'autre sens. Soit vous laissez filer, vous dites "file-sirop", soit vous vous sentez de relancer, et vous annoncez un sirop de 14. Vous, comme on a commencé les annonces, vous avez pas le droit de laisser filer, vous pouvez soit relancer avec un sirop de 21, soit vous abandonnez le tour et vous dites "couche-sirop" (ou "sirop-jaloux", ça dépend des régions). Puis après, soit on fait la partie, soit je fais un contre-sirop, boum, et à partir de là, sirop de pommes sur 21, donc on fait la partie en 4 tours, jusqu'à qu'il y en ait un qui sirote.
...
A la gagne, y a que 3 possibilités: Soit vous faites votre sirop de 8 et vous dites "beau-sirop" et on recompte. Soit vous faite votre sirop de 14 et vous dites "beau-sirop, sirop-gagnant" et on vous rajoute la moitié. Soit vous faites votre sirop de 21 et vous dites "beau-sirop, mi-sirop-siroté, gagne-sirop, sirop-grelot, passe-montagne, sirop-bambou"!
- Oui, moi je crois qu'il faudrait quand même faire un tour pour rien [...]. Bon bah allez, je me lance.
- Non, non mais ça se joue pas avec des dés ! Ça se joue avec des cartes !
- Mais... Mais j’en ai pas, des cartes.
- Ça fait rien, on va essayer avec des dés. De toute façon, ce qui compte, c’est les valeurs !

Kaamelott, Perceval et le Contre-Sirop
Livre II (2006)

cf. aussi le Kamoulox, naturellement

Quelque part dans le Cantal


Rien d'exceptionnel ici, c'est juste que c'est vert...


Sinon:


"the golden tree"


"Close Encounters of the Third Kind"
(copyright Spielberg)


"the crying cow"


La suite, demain!
Cela se passera cette fois Quelque part dans l'Aveyron

dimanche 15 août 2010

Lonely at the top

I've been around the world
Had my pick of any girl
You'd think I'd be happy
But I'm not

Everybody knows my name
But it's just a crazy game
Oh, it's lonely at the top

Listen to the band, they're playing just for me
Listen to the people paying just for me
All the applause, all the parades
And all the money I have made
Oh, it's lonely at the top

Listen all you fools out there
Go on and love me, I don't care
Oh, it's lonely at the top
Oh, it's lonely at the top


Randy Newman, Lonely at the top
Sail Away (Reprise, 1972)
randynewman.com

mardi 10 août 2010

How Soon is Now? / Smiths' Cover Arts part.3

Magie d'internet, je suis en vacances, et pourtant je vous offre un nouvel épisode de la Saga des Smiths en Covers. J'espère que ça vous fait plaisir...

Après la sortie de la compilation "Hatful of Hollow", quelques autres singles suivront tout au long de l'année 1985, l'année de Meat is Murder (que j'écoute d'ailleurs au moment de rédiger ces lignes, ah la la, c'est bon).

"how soon is now?" montre l'acteur Sean Barrett, Franckie dans le film Dunkirk (1958). Dunkirk, c'est Dunkerque, et il y est question non pas d'une rassemblement de tuning sur le parking d'un Super U, mais du siège de la ville par les troupes allemandes en 1940.
Sur la photo, Franckie prie, mais c'est vrai que quand même, on pourrait se demander ce qu'il tient entre ses mains, du coup les américains ont préféré changer la pochette du single au moment de sa sortie sur leur territoire.



Sur "Shakespeare's Sister", on voit l'actrice Pat Phoenix dont Morrissey est fan. Ca ne vous dira sans doute rien, on se souvient en fait surtout d'elle en Angleterre pour sa participation à Coronation Street, qui est à ce jour le soap le plus long de toute la galaxie (et de tous les temps). Il a débuté en 1960... et continue encore de nos jours!! Le 7000ème épisode a été diffusé l'an passé... Personnellement, je recommande tout particulièrement la saison 37.

Morrissey était d'ailleurs à ce point fan qu'il a interviewé l'actrice. Vous pouvez lire le tout ici. Moi, je me contente de chiper une photo



[Ici, Morrissey vient de raconter la blague du fou qui repeind son plafon...]

Ensuite, sur "That Joke isn't funnt anymore", figure un enfant-acteur italien inconnu au bataillon, et sur "Barbarism Begins at Home", c'est Viv Nicholson, mais je vous l'ai déjà dit .



Le choix éditorial qui se pose à moi maintenant est le suivant: dois-je vous parler de "the headmaster ritual", sorti aux pays-bas uniquement? Je tranche, et répond "non".

D'autant que j'ai besoin de toute votre attention pour l'album "Meat is Murder". La pochette est connue, l'image vient du documentaire d'Emile de Antonio sur la guerre du Vietnam ("In the year of the pig", 1969)



En vrai, bien évidemment, l'inscription était tout autre :

"the link is that I feel animal rights groups aren't making any dramatic headway because most of their methods are quite peaceable, excluding one or two things. It seems to me now that when you try to change things in a peaceable manner, you're actually wasting your time and you're laughed out of court. And it seems to me now that as the image of the LP hopefully illustrates, the only way that we can get rid of such things as the meat industry, and other things like nuclear weapons, is by really giving people a taste of their own medicine."
Morrissey, au NME (1985)


voir aussi:
Hand in Glove / Smiths' Cover Arts part.1
What Difference Does It Make? / Smiths' Cover Arts part.2

dimanche 8 août 2010

les aristocrates à la lanterne

Vous avez dû remarquer, ce blog a ses hérauts héros récurrents.
Raymond Queneau est l'un d'eux.

Je m'aperçois qu'il me restait un dernier extrait des Fleurs Bleues à citer ici... avant de m'attaquer à la relecture du "Chiendent" (grand moment en perspective)

Dans cet épisode, le Duc d'Auge est sommé par un représentant du Roi de s'acquiter d'une amende, pour avoir occis une petite vingtaine de bourgeois sur un mouvement d'humeur.
(Pour un pitch global, voir les premiers articles rédigés au sujet de ce livre)

- Je n'ai pas droit à une réduction en tant que croisé de la septième? demanda le duc avec une pâle grimace, la pâle grimace qu'il avait accoutumé de faire dès qu'on voulait toucher à ses sous.
Le héraut répondit avec fermeté:
- Non. Le compte est juste.
Il ajouta:
- Il n'est susceptible que de croître. Jamais de diminuer.
Joachim d'Auge se tut et fit la mine de réfléchir.
Le chapelain devina que le duc envisageait de passer à la rébellion ouverte. Le héraut devina la même chose. Le duc devina que les deux autres avaient deviné. Le chapelain devina que le duc avait deviné qu'il avait deviné, mais ne devinait point si le héraut avait lui aussi deviné que le duc avait deviné qu'il avait deviné. Le héraut, de son côté, ne devinait point si le chapelain avait deviné que le duc avait deviné qu'il avait deviné, mais il devinait que le duc avait deviné qu'il avait deviné.
Cette rude tension disposait au silence, ce qui permit à tout un chacun d'entendre Bélusine et Pigranelle chanter des chansons de toile, des chevaux hennir, des chiens aboyer, des céhéresses piétiner et Phélise bêler.
- Jarnicoton, finit par s'écrier le duc, décision ai prise, point ne verra le saint roi la couleur de mes écus tournois d'or raffiné pur et sans alliage, point n'écouterai messes cendrées, point ne dirai ribambelles de patravéfiteors, et point ne me croiserai. Hors d'ici, faraud céhéresse! [...] Si les Capets commencent à nous traiter de la sorte, on verra bientôt les aristocrates à la lanterne.

Les Fleurs Bleues, Raymond Queneau (1978)

Il y a un petit côté "Sacré Graal" (1975) dans ces scènes médiévales...



Prochain post:
How Soon is Now? / Smiths' Cover Arts part.3

jeudi 5 août 2010

Warm Slime

Un petit Crossed Covers qui est dans mes cartons depuis le mois de juin... Depuis la sortie de "Say No to Love" de Pains of Being Pure at Heart.

Ce single reprend une peinture de Winston Chmielinski, dont l'original se trouve ici.
Une autre de ces oeuvres, un peu plus bas.

En revanche, je n'ai pas réussi à connaître l'auteur de la pochette de l'album de Thee Oh Sees (un petit côté Egon Schiele, je trouve). Si quelqu'un a le disque, je veux bien qu'il me donne l'information!



Bien sûr, on peut s'amuser à peindre directement sur le modèle



Pains of Being Pure at Heat, Say no to Love (, 2010)
Thee Oh Sees, Warm Slime (In the Red, 2010)
Winston Chmielinski, Man Woman Bird
V/A, Optimo: Fabric 32 (Fabric, 2010)

Edit:




Taragana Pyjarama, s/t EP (Fool House, 2011)
Ornette, Crazy (Discograph, 2011)
[Edit :] Zaz, Recto Verso (Play on, 2013)

mercredi 4 août 2010

Putain toi, t'es trop wild

Je remercie Mendelson d'exister.

Raconte comment tu t'es couchée trop tard, comment t'as trop bu et combien de pétards. Raconte ta nuit blanche, ouah trop pur, t'étais raide def, tu rentrais dans les murs. Raconte comment t'étais ruinée dans les chiottes, tu gamellais Justine qu'est une vraie pote. Raconte comment tu t'es faite troncher, par le copain de Justine qu'était défoncé. Putain toi t'es trop cool. Tu sais ça, t'es trop cool. Tu te souvenais plus comment tu t'appelles, raconte tu pogotais dans les poubelles, en hurlant Dieu, Dieu sauve la Reine et d'autres trucs vachement trop rebelles. Putain toi t'es trop wild, tu sais, t'es trop wild. Raconte encore comment t'as gerbé tes Martinis dans l'escalier, tu sais pas comment t'es rentrée chez toi, putain cette casquette, cette gueule de bois. Putain toi t'es trop cool, t'es trop cool.

Mendelson, histoire naturelle
L'avenir est devant (Lithium, 1997)
mendelson.free.fr

Cette chanson reflète mon point de vue quand j'étais en Ecole. Autant dire, une position ultra-minoritaire, là où le mot d'ordre tacite était "be drunk, be cool". Qu'on s'entende: ce que je dénie, c'est la corrélation entre les deux.

C'était la troisième et dernière partie de ma série de lyrics sur la Cool Attitude.
Lire aussi:
http://arise-therefore.blogspot.com/2010/08/you-think-that-poor-is-cool.html
http://arise-therefore.blogspot.com/2010/08/teenage-guide-to-popularity-part1.html

mardi 3 août 2010

I told you i was freaky




Flight of the Conchords, I told you i was freaky
(Sub Pop, 2010)
Kumi Solo, My love for you is a cheap pop song
(Clapping Music, 2009)
Björk, Hidden Place (Universal, 2001)

You think that poor is cool?

Je poursuis la thématique lancée par le morceau "Popular" de Nada Surf dimanche, en allant cette fois du côté des colleges anglais.



C'est Jarvis Cocker qui chante, et il est à nouveau question d'une nana qui cherche à être cool.

1 point à celui ou celle qui trouve de quelle série est extraite la photo qui suivra (la dernière fois, c'était facile, et vous avez tous reconnus Kelly Kapowsky)


She came from Greece, she had a thirst for knowledge
She studied sculpture at Saint Martin's College
That's where I caught her eye
She told me that her Dad was loaded
I said "In that case I'll have rum and coca-cola
She said "fine"
And then in 30 seconds time she said :

"I want to live like common people
I want to do whatever common people do
I want to sleep with common people
I want to sleep with common people like you"

Well what else could I do?
I said "I'll see what I can do"
I took her to a supermarket
I don't know why
but I had to start it somewhere
so it started there
I said "pretend you've got no money"
but she just laughed
and said "oh you're so funny"
I said "Yeah
Well I can't see anyone else smiling in here

Are you sure
you want to live like common people
you want to see whatever common people see
you want to sleep with common people
you want to sleep with common people like me?"

But she didn't understand
she just smiled and held my hand
Rent a flat above a shop
Cut your hair and get a job
Smoke some fags and play some pool
Pretend you never went to school
But still you'll never get it right
'cos when you're laid in bed at night
watching roaches climb the wall
if you called your dad he could stop it all



You'll never live like common people
You'll never do whatever common people do
You'll never fail like common people
You'll never watch your life slide out of view
and then dance and drink and screw
because there's nothing else to do

Sing along with the common people
Sing along and it might just get you through
Laugh along with the common people
Laugh along although they're laughing at you
and the stupid things that you do
because you think that poor is cool
Like a dog lying in a corner
they will bite you and never warn you
Look out
they'll tear your insides out
'cos everybody hates a tourist
especially one who thinks
it's all such a laugh
yeah and the chip stain's grease
will come out in the bath
You will never understand
how it feels to live your life
with no meaning or control
and with nowhere left to go
You are amazed that they exist
and they burn so bright
whilst you can only wonder why
...



Pulp, Common People
Different Class (Islands, 1995)

Impossible de lire ces paroles sans chanter, ça doit vous faire ça aussi, j'imagine

lundi 2 août 2010

Quelque part dans le neuf quatre



C'est pris avec mon téléphone portable, d'où la qualité moyenne...

J'ai une mémoire visuelle un peu particulière, qui est sensible aux combinaisons de couleurs... Elles sont bien sûr innombrables, mais certaines d'entre elles me renvoient directement à des objets, photo ou tenues déjà vues par le passé.

J'avais d'ailleurs tantôt le projet d'en faire une rubrique sur ce blog, mais la réflexion n'est pas encore mure. Il faudrait peut-être que je commence par acheter un de ces livres-nuanciers qu'on voit dans les librairies spécialisées dans les Arts Graphiques.

Quoiqu'il en soit, quand j'ai revu cette photo au moment de la publier, Rouge-Jaune-Blanc-Noir, PAF, elle m'a immédiatement rappelé la pochette de l'album de Battles.



non?

Battles, Mirrored (Warp, 2007)

dimanche 1 août 2010

the teenage guide to popularity

Nada Surf jouait hier en concert gratuit sur le Parvis de l'Hôtel de Ville. Je reste attaché à ce groupe, à ses sympathiques membres (interviewés en 2000), et à leurs deux premiers albums, "High/Low" et surtout "the Proximity Effect" (feat. pour ce dernier les indépassables 80 Windows, Troublemakers, et the Voices).

Autant de bonnes raisons de passer les voir, donc.

Une bonne partie du public attendait "Popular", leur hit de 1996 (que je me souviens avoir découvert sur Skyrock, chez Maurice, hum)

Mais que raconte au juste cette chanson? Sans jamais m'être vraiment penché sur le texte, je la "rangeais" aux côtés de "Creep" (1993) et "Common People" (1995), dans la thématique "être ado et se sentir cool, ou pas".

Il y a effectivement de ça.
Le contexte de la chanson est celui de ces colleges / universités / high school tel qu'on l'appréhende en France via quantité de séries TV américaines.

La chanson s'adresse à une nana.
Premier point: comment (bien) larguer son copain


Three important rules for breaking up
Don't put off breaking up when you know you want to
Prolonging the situation only makes it worse
Tell him honestly, simply, kindly, but firmly
Don't make a big production
Don't make up an elaborate story
This will help you avoid a big tear jerking scene
If you wanna date other people say so
Be prepared for the boy to feel hurt and rejected
Even if you've gone together for only a short time,
And haven't been too serious,
There's still a feeling of rejection
When someone says she prefers the company of others
To your exclusive company,
But if you're honest, and direct,
And avoid making a flowery emotional speech when you break the news,
The boy will respect you for your frankness,
And honestly he'll appreciate the kind of straight forward manner
In which you told him your decision
Unless he's a real jerk or a cry baby you'll remain friends

I'm head of the class
I'm popular
I'm a quarter back
I'm popular
My mom says I'm a catch
I'm popular
I'm never last picked
I got a cheerleader chick




Being attractive is the most important thing there is
If you wanna catch the biggest fish in your pond
You have to be as attractive as possible
Make sure to keep your hair spotless and clean
Wash it at least every two weeks
Once every two weeks
And if you see Johnny football hero in the hall
Tell him he played a great game
Tell him you liked his article in the newspaper

I'm the party star
I'm popular
I've got my own car
I'm popular
I'll never get caught
I'm popular
I make football bets.
I'm a teachers pet


I propose we support a one month limit on going steady
I think It will keep people more able to deal with weird situations
And get to know more people
I think if you're ready to go out with Johnny
Now's the time to tell him about your one month limit
He wont mind he'll appreciate your fresh look on dating
And once you've dated someone else you can date him again
I'm sure he'll like it
Everyone will appreciate it
You're so novel what a good idea
You can keep your time to your self
You don't need date insurance
You can go out with whoever you want to
Every boy, every boy, in the whole world could be yours
If you'll just listen to my plan
THE TEENAGE GUIDE TO POPULARITY

I'm head of the class
I'm popular
I'm a quarter back
I'm popular
My mom says I'm a catch
I'm popular
I'm never last picked
I'm a cheerleader chick


Nada Surf, Popular
high/low (1996)
www.myspace.com/nadasurf